La justice française enquête sur les liens Lafarge-Daech en Syrie

le-groupe-lafarge-terrorismeLe géant du ciment français Lafarge fait l’objet d’une enquête judiciaire après une plainte de Bercy. Le groupe est soupçonné d’avoir acheté du pétrole en Syrie malgré l’interdiction et d’avoir entretenu des relations avec le groupe terroriste Daech.

Le ministère français de l’Économie a saisi la justice à l’automne dernier sur de possibles infractions commises par le cimentier français Lafarge en faisant fonctionner une usine en Syrie, malgré des interdictions européennes.

Bercy a confirmé à la presse, jeudi 19 janvier, le dépôt d’une plainte, sans autre précision. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire sur la base de cette plainte en octobre, a rapporté l’AFP citant une source judiciaire.

En juin dernier, le journal Le Monde avait révélé de possibles arrangements avec Daech en 2013 et 2014 pour faire fonctionner la cimenterie de Jalabiya, dans le nord du pays, qui est sous la responsabilité d’une filiale locale de Lafarge.

Une plainte déposée par une ONG en novembre pour « financement du terrorisme » en Syrie

Le fonctionnement de la cimenterie de Jalabiya, dans le nord de la Syrie, sous la responsabilité d’une filiale locale de Lafarge, a déjà fait polémique quand le journal Le Monde (article réservé aux abonnés) avait révélé en juin de possibles arrangements avec l’organisation État islamique (EI ou Daech).

De son côté, l’ONG Sherpa, qui défend les victimes de « crimes économiques », avait déposé une plainte avec constitution de partie civile en novembre. Elle dénonçait notamment des faits de financement du terrorisme et visait plus spécifiquement les possibles arrangements de Lafarge avec le groupe terroriste Daech pour faire fonctionner l’usine en 2013 et 2014, jusqu’à ce que l’organisation terroriste en prenne le contrôle en septembre 2014. Cette plainte visait à obtenir l’ouverture d’une information judiciaire confiée à des juges d’instruction, ce qui n’est pas encore le cas à l’heure actuelle.

Il est temps  que Lafarge réponde judiciairement

Selon le journal français, un « un certain Ahmad Jaloudi » avait été envoyé « par Lafarge à Manbij, pour obtenir des autorisations de l’EI de laisser passer les employés aux checkpoints », alors que les terroristes devenaient à l’époque de plus en plus incontournables dans la région. Un laissez-passer, estampillé du tampon Daech, aurait aussi permis aux camions d’arriver sur le site pour l’approvisionner, ce qui supposerait le paiement de taxes. Le Monde évoquait également l’intervention d’intermédiaires et de négociants afin de vendre au cimentier du pétrole raffiné par le groupe terroriste Daech.

Face à ces révélations et à la plainte de Sherpa, LafargeHolcim avait réagi en indiquant qu' »en Syrie comme ailleurs, la priorité du groupe a toujours été la sécurité de (ses) collaborateurs et de leurs familles ». Il soulignait alors que l’usine citée était un « employeur important dans la région » et « avait un rôle vital » pour les Syriens, « car elle leur fournissait les matériaux de construction essentiels à leurs besoins en matière de développement et d’urbanisation ».

Citée par l’AFP , Me Marie Dosé, l’avocate de Sherpa a déclaré : « il est temps que Lafarge réponde judiciairement des faits scandaleux qui lui sont reprochés ». « Nous attendons la désignation d’un juge d’instruction pour que des investigations liées à son comportement en Syrie et ses liens avec l’EI puissent être diligentées dans les meilleurs délais », a-t-elle expliqué.

Avec agences