L’artiste tunisienne Najah Zarbout propose un « dialogue entre la Corse et Kerkennah »

Après de longs mois de fermeture, le Frac de Corte propose dès le 19 mai prochain « Thanaya, entre plis et chemins » de l’artiste tunisienne Najah Zarbout. Une exposition entre la Corse et l’archipel de Kerkennah qui aborde des thèmes sociétaux chers à l’artiste, comme les migrants.

Dans une salle du Frac – fonds régional d’art contemporain- à Corte, Najah Zarbout se baisse pour retirer un morceau d’adhésif resté au sol. « Il reste toujours quelque chose à faire », sourit timidement l’artiste tunisienne.

La veille, secondée par Sirine Abdelhedi, commissaire d’exposition, elle a terminé l’installation de « Thanaya, entre plis et chemins », dans le cadre de la saison Africa 2020. Dans les différents espaces, se succèdent réalisations plastiques, vidéos et installations. « Entre l’archipel de Kerkennah, d’où je suis originaire, et la Corse, il y a beaucoup de différences, notamment au niveau du paysage. À Kerkennah, tout est plat alors qu’ici, c’est montagneux, les routes sont sinueuses. Ça m’a frappé quand je suis venue ici pour la première fois, et ça m’a donné l’idée de créer un dialogue entre les deux îles », explique l’artiste.

Leur point commun : le vent. L’élément est un des fils conducteurs de l’exposition. « C’est lui qui forme les vagues dans les œuvres de papier, c’est lui qui fait bouger les jupes des danseurs et qui passe dans les hautbois des musiciens », souligne-t-elle.

Harraga

À travers ses créations, pour lesquelles elle privilégie le papier qu’elle découpe, plie, lacère, déchire, entaille, Najat Zarbout questionne aussi la place de l’humain dans sa soumission et son conditionnement. Un petit personnage, sans identité ni origine, fait ainsi régulièrement une apparition au milieu des lamelles.

Il représente les harraga, les migrants clandestins. « Le point de départ de ce travail est un événement qui est arrivé en 2016 lorsqu’une centaine de morts ont été retrouvés sur les côtes de Kerkennah. Ça m’a bouleversé et j’ai essayé de travailler sur cet oxymore entre l’atrocité de cette traversée et cet acte de désobéissance de ne pas accepter sa vie et de chercher une vie meilleure », précise l’artiste tunisienne.

Montée des eaux

Sur un large mur du Frac, une photo d’une plage de Kerkennah. Dans ce paysage sans relief, se détachent seulement quelques palmiers. Au-dessus des troncs des feuilles calque sur lesquelles sont dessinées des palmes ont été collées.

Najah Zarbout les soulève une par une. Sur la photo d’origine, il ne reste que les troncs. « Tous ces arbres sont morts. À cause de la montée des eaux, les sols sont beaucoup plus salés et font mourir les plantes », commente l’artiste.

Cette œuvre a été ajoutée après les confinements dus à la pandémie de coronavirus. « Durant cette période, la nature a repris ses droits et j’ai pris conscience de l’écologie et de la problématique des déchets », confie Najah Zarbout.

L’exposition « Thanaya, entre plis et chemins » a ouvert ses portes le 7 mai et s’étalera jusqu’au 30 juin prochain 

Source : France3