Plus de 600 arrestations parmi les jeunes manifestants en colère

Alors que de nombreuses villes de Tunisie sont en proie à des émeutes nocturnes, le ministère de l’Intérieur a annoncé l’arrestation de plus de 600 personnes. La Tunisie est touché par une crise économique et sociale inédite.

Plus de 600 personnes ont été arrêtées, a indiqué le ministère de l’Intérieur lundi 18 janvier, après une troisième nuit d’émeutes dans de nombreuses villes du pays, où la police déployée pour imposer un couvre-feu a été prise pour cible par des jeunes. Des troubles ont éclaté dans des quartiers marginalisés frappés de plein fouet par une crise économique inédite, au lendemain du dixième anniversaire de la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, le 14 janvier 2011.

Ces troubles coïncident avec un confinement général de quatre jours qui s’est achevé dimanche 17 janvier, pour tenter d’endiguer une flambée de cas de Covid-19, assorti d’un couvre-feu à partir de 16h00.

Le porte-parole du ministère de l’Intérieur Khaled Hayouni a fait état de 632 arrestations, évoquant des groupes de personnes de 15 à 25 ans qui ont «brûlé des pneus et des poubelles afin d’entraver les mouvements des forces de sécurité». Dimanche 17 janvier, pour la troisième nuit consécutive, la police prise pour cible à coups de pierres et d’autres a rétorqué à coups de gaz lacrymogènes dans plusieurs localités, dont le vaste quartier populaire d’Ettadhamen en périphérie de la capitale Tunis.

Des pillages ont également eu lieu dans certaines zones. Ces heurts interviennent dans un contexte de dégradation de la situation sociale et d’instabilité politique en Tunisie.

«Cela n’a rien à voir avec les mouvements de revendication garantis par la loi et la Constitution», a néanmoins estimé le porte-parole du ministère de l’Intérieur. «Les revendications se déroulent normalement le jour […] et sans actes criminels», a-t-il ajouté dans une interview à la radio Mosaïque.FM, faisant état de deux blessés parmi les forces de l’ordre.

Des manifestations interdites en raison du Covid-19

Amnesty International a appelé le 18 janvier les forces de police à «respecter les droits de ceux qu’ils arrêtent, quelles que soient les raisons et les circonstances de leur arrestation». Dans un communiqué, l’ONG s’est inquiétée des témoignages de violences sur des protestataires et de l’arrestation d’un militant qui manifestait pacifiquement le 18 janvier au matin.

Les manifestations sont actuellement interdites en raison du Covid-19. Mais quelques dizaines de personnes ont défilé le 18 janvier dans le centre de Tunis, dénonçant l’augmentation de la pauvreté, «la corruption allant du gouvernement à la police», et «la répression policière». Ils ont été bloqués par la police à proximité du ministère de l’Intérieur.

La centrale syndicale , l’UGTT, a rappelé que la Constitution garantit le droit de manifester et a appelé les jeunes à cesser les protestations nocturnes, propices à des dépassements. Plusieurs appels informels à manifester contre le coût de la vie et la pauvreté ont été lancés sur Facebook pour le 19 janvier matin à Kairouan (centre), Sfax (centre-est) ou encore Tunis dans l’après-midi. L’armée a déployé des renforts dans les régions de Bizerte (nord), Sousse (est), Kasserine et Siliana (centre-ouest) afin de protéger les bâtiments publics, a indiqué le 18 janvier à l’AFP un porte-parole du ministère de la Défense, Mohamed Zikri.