Les poches vides, Kaïes sera à Sidi Bouzid pour laisser les gens en rut, près à niker tout ce qui bouge

Le 17 décembre 2019, le Président de la République Kaïs Saïed se déplacerait  à Sidi Bouzid pour prononcer son premier discours adressé aux tunisiens directement, depuis son investiture en octobre 2019. La date du 17 décembre correspond à la commémoration du suicide volontaire ou accidentel du fameux Bouazizi le 17 décembre 2010. Acte commercialisé comme l’étincelle qui a déclenché le feu d’une révolte ayant abouti à la chute du régime de Ben Ali le 14 janvier 2011.

Depuis 2011, les révolutionnaires de la 25 ème heure, ont fait de cette ville et en cette date une Mecque incontournable, et de la charrette de Bouazizi élevée en monument d’une révolution imaginaire, la Quaba à laquelle on s’agrippe pour recevoir la bénédiction de Bouazizi et le sceau de la chasteté.

La ville de Sidi Bouzid est devenue la scène d’une comédie qui fait plus pleurer que rire. Tout homme politique qui se voit en manque ou en perte de popularité, s’y rend arborant l’écharpe palestinienne, fustige les gouvernants, même s’il en fait partie, pour leur négligence de cette région, la laissant embourbée dans la pauvreté, et exclue de toute œuvre de développement. Puis, ce politicard glorifie les habitants de cette région et vante leur « héroïsme légendaire » lors de la révolution du 14 janvier 2011 qui a « ébloui » le monde entier, en reprenant les propres termes de notre Président de la République. Il les gonfle à bloc contre l’ingratitude du système, leur promet monts et merveilles et surtout la réhabilitation de leur dignité bafouée. Il les laisse en rut, près à niker tout ce qui bouge et regagne son fauteuil ministériel ou parlementaire ou partisan, fier du devoir accompli.

Le 17 décembre 2019, Kaïes Saïd sera en pèlerinage à Sidi Bouzid. N’ayant rien en poche et aucune solution aux attentes des habitants de cette région, car il n’y a jamais pensé, il distribuera comme son habitude, bisous et embrassades. Mais, surtout, il va les embobiner avec son remède miracle, l’abolition radicale du système politique actuel pour lui substituer un nouveau système fondée sur l’auto gouvernance locale. Une fois ce système instauré, le citoyen serait impliqué directement dans la prise des décisions relatives au développement de sa localité et de sa région et verra tous ses problèmes résolus. Istanna ya djaja 7atta yjik el 9am7 min Béja. Les citoyens de Sidi Bou Zid seront une fois encore gonflés à bloc contre ce système impotent et gangrené par la corruption et qui n’a pu les gratifiés des fruits de la révolution dont ils ont été les principaux acteurs, comme beaucoup se plaisent à le dire. Les zouaves doivent se prévaloir de leur droit aux galons.

Le 17 décembre 2019, Kaïes Saïd, accroché à l’illusion de la révolution, à la dignité et à l’équilibre régional, thèmes prisés par les révolutionnaires de la 25ème heure, s’emploiera à faire de cette date, le point de départ d’une mobilisation générale pour imposer son nouveau système politique, indépendamment des mécanismes constitutionnels. Sidi Bouzid était à l’origine d’une fronde qui a évolué en boule de neige aboutissant à la chute du régime de Ben Ali. Dans son esprit, cette région rebelle entraînera la chute du régime actuel, et volera pour sa gloire.
Kaïes Saïd, oublie que les événements qui ont suivi le suicide de Bouazizi, étaient noyautés, canalisés et récupérés par des agents de l’intérieur à la solde des stratèges américains et leurs vassaux qatari et turc qui ont planifié, bien avant, la destitution de Ben Ali en faveur des islamistes.

Lui, son aventure à la Don Quichotte, n’entraînera que plus de blocage de la société, d’anarchie et de chaos. Son populisme démentiel d’ « echa3b yourid » ou tout le pouvoir au peuple aurait de très fâcheuses conséquences. Les citoyens seront menacés dans leurs biens et leur liberté. Quant à l’Etat, il serait condamné à la déliquescence. La Somalie et la Lybie ne sont pas des exemples à suivre. Le droit constitutionnel  ne les classe même pas dans les systèmes académiquement reconnu.

Ta haine de Bouguiba ne doit pas t’amener à détruire ce qu’il a construit, l’Etat national moderne, qui t’a permis d’étudier à l’université et d’avoir une bourse conséquente. Avec ton aventure tu vas priver l’enfant de Sidi Bouzid même du droit au kouttab.

Monsieur Kaïes Saïd, aie pitié de ce pays. Des martyrs ont donné leur sang pour lui du temps de la colonisation. Des opposants à Bourguiba et à Ben Ali ont soufferts de la répression pour t’avoir permis d’accéder à la magistrature, alors qu’en ces temps tu étais à la planque, la tête enfouie dans tes livres, attendant la fin du mois pour avoir ta bourse et puis ton salaire.

Mounir Chebil