Pourquoi le 25 juillet ?

Se trouverait-il quelqu’un pour me rappeler, de tout ce que le président de la république a dit depuis son investiture jusqu’au 25 juillet 2021, une seule phrase exprimant l’idée qu’il se faisait de l’un des problèmes réels auxquels les tunisiens étaient confrontés ? Pendant plus d’une année et demie, nous avons assisté, ahuris, à des diatribes, où, comme si s’était de règle, les qualités les plus éminentes d’un chef d’état ne pouvaient mieux faire leurs preuves qu’en s’en prenant à des ennemis. La Tunisie n’en manquait pas, mais, sans les nommer, il les avait faits siens et c’est ainsi que la scène politique s’est muée en foire d’empoigne où le pauvre pays, délaissé, réduit au rôle de caisse de résonance, se cherchait dans un mot, au détour d’une envolée, j’allais dire lyrique.

Englobée dans un même regard d’ensemble, loin d’une psychanalyse qu’il me répugne d’appeler au secours, la tragédie qui se déroule devant nous et , ne l’oublions pas, à nos dépens, a pour héros un homme auquel le sort de la Tunisie, qui ne lui devait rien, avait été confié par accident et qui a fait du mal-être du peuple de celle-ci l’exutoire d’un rare égocentrisme ou tout, réel et imaginaire confondus, est traité selon un mode personnel, shakespearien. J’aurais été peut-être mieux inspiré d’introduire la présente communication en posant une autre question, faisant appel à la mémoire de mes lecteurs sur une seule fois où il aurait parlé à la première personne du pluriel.

Cela ne pouvait plus durer et il s’en est finalement aperçu. Certainement pas par une prise soudaine de conscience, un 25 juillet. La bouteille d’oxygène envoyée d’urgence à Métlaoui a sauvé une vie humaine et cela devait suffire à porter aux nues l’honneur de celui qui en a donné l’ordre mais ne suffisait certainement pas à susciter un cataclysme institutionnel, encore moins un épanchement émotionnel déplacé de qui devait savoir, sans cela, ce qui manquait à nos hôpitaux. Il suffit de reprendre le fil des discours, des postures, pour se rendre à cette évidence que le président de la république s’est donné toutes les peines du monde pour établir un lien qu’il croyait devoir être fusionnel entre sa personne et le pays, sa culture et ses références l’attestent. Tous les artifices, mêmes ceux maladroitement romanesques de complots à la Borgia, ont été mis à contribution pour créer ce lien, autrement dit pour s’impliquer dans une communauté de destin avec « Tounes » et faire que ses problèmes, non pas personnels car il n’en a pas, mais de personnalité à la fonction qu’il occupe et ils sont nombreux, soient aussi les siens.

Le 25 juillet, trouvant le terrain bien préparé par le travail inlassable de Me Abir Moussi et une décision du conseil Supérieur de la Magistrature de mauvais augure pour le mouvement islamiste dit « ennahdha », il a simplement inversé les rôles pour impliquer la Tunisie dans son jeu personnel en prenant en quelque sorte les institutions de la République à son compte. A preuve, en près de deux mois, rien n’a été fait et les discours restent les mêmes.

Abdessalem Larif