Quelle sensibilité ! Quelle modestie ! Quelle honnêteté !!

On se lève le matin et on se dit « tiens, je suis encore là ! au Palais de Carthage, quel bonheur !. Pour bien commencer la journée, je vais leur monter, ces tunisiens, un président comme ils n’en ont jamais vu, honnête, sensible à leurs peines, et surtout modeste. » En disant cela, qu’aurais-je inventé ou ajouté à la réalité donnée en spectacle sur le banc d’un dispensaire de quartier, dans l’attente respectueuse, disciplinée, citoyenne, de son tour d’être vacciné contre le Covid 19 ? Cela se serait passé de commentaire, si notre héros pouvait ignorer qu’il dispose au Palais d’un service médical spécial, que son déplacement vers le dispensaire devait mobiliser à grands frais du personnel et des moyens de sécurité considérables, dont une ambulance médicalisée.

Se moquer ainsi des tunisiens à bout, qui souffrent atrocement de la maladie, de la pauvreté, de la loi des brigands et de l’humiliation de leur pays n’a pas de nom. La déclaration qui a accompagné ce geste artificieux, sournois, selon laquelle il n’avait pas l’intention de se faire vacciner par principe, va plus loin que ce voyeurisme spirituel fade d’une profession de foi qui, en soi, n’intéresse personne, mais par dérogation à laquelle, un sacrifice a été consenti. Eh oui ! La raison, précisa t-il, en était qu’il fallait par cet exemple inciter les tunisiens à se faire vacciner, comme s’ils y étaient réticents, alors que leurs cris de détresse s’élevaient, assourdissants, vers le ciel pour demander justice divine sur leurs tueurs par négligence et supplier ce même président de faire la quête des vaccins où qu’ils se trouvaient. Parler d’honnêteté n’a plus de sens.

Abdessalem Larif