Le départ de Berat Albayrak intervient alors que la situation économique du pays, en pleine crise monétaire, se dégrade rapidement.
Berat Albayrak, homme clé du régime et gendre du président Erdogan, a annoncé son départ du gouvernement turc. Cette démission survient au lendemain du limogeage du directeur de la banque centrale par un président qui tente ainsi d’enrayer la chute vertigineuse de la monnaie nationale.
La crise économique en Turquie se double d’un début de crise politique. Alors que la livre turque a perdu près de 30 % de sa valeur en un an, le gouverneur de la banque centrale a été remplacé samedi 7 novembre via un décret présidentiel par le chef du budget de la présidence de la République, Naci Agbal, rapporte l’agence de presse officielle Anadolu. Et le ministre des Finances, qui n’est autre que le gendre du président Erdogan, a annoncé son départ du gouvernement dimanche 8 novembre, sans réaction officielle ce lundi.
Dès sa première déclaration, le nouveau gouverneur de la banque centrale a souligné que son “objectif principal” était de “garantir une stabilité des prix”, note le quotidien Sözcü. Car la livre dégringole et l’inflation, qui dépasse les 12 %, a de lourdes conséquences sur le pouvoir d’achat des citoyens turcs. L’ancien ministre des Finances d’Erdogan (en poste entre 2015 et 2018) a promis de mener une “politique monétaire transparente et responsable” alors que les investisseurs étrangers et les agences de notation s’inquiètent du manque d’indépendance de cette institution et du poids du président Erdogan dans les prises de décisions
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a-t-il délibérément sacrifié son propre gendre, Berat Albayrak, pour apaiser les dieux de l’économie et la nouvelle administration américaine ? Ou espérait-il que celui-ci tiendrait bon à la tête du ministère du Trésor et des finances en dépit du désaveu de sa politique économique et de camouflets cinglants à son autorité ?
L’attitude des deux hommes, au cours des dernières 48 heures, laisse subsister le doute. C’est sur le réseau social Instagram que Berat Albayrak a déclaré dimanche 8 novembre au soir qu’il renonçait à ses fonctions « en raison de problèmes de santé ». « A partir de maintenant, je consacrerai mon temps à ma mère, mon père, ma femme et mes enfants », a poursuivi le politicien de 42 ans, longtemps décrit comme le successeur possible d’Erdogan, laissant entendre qu’il mettait ici un point final à sa carrière politique. Aucun communiqué officiel n’est venu confirmer l’information. Il a fallu attendre les premiers messages de soutien de ses proches, plusieurs heures plus tard, pour confirmer la réalité de sa démission de ce super-ministère dont il avait pris la tête en juillet 2018, devenant ainsi le deuxième homme le plus puissant de l’exécutif, derrière son beau-père.
Cette apparente improvisation s’est accompagnée d’un silence total de la présidence durant vingt-sept heures. Lundi, à 22 heures, le ministère de la communication a finalement annoncé que la demande du ministre « d’être libéré de ses fonctions a été acceptée ». Plus tard dans la nuit, un décret présidentiel a confié le Trésor et les finances à Lütfi Elvan, 58 ans, qui a été successivement ministre des transports (2013-2015), vice-premier ministre chargé des réformes et des investissements (2015-2016) et ministre du développement (2016-2018).