EST/EL AHLI ou une campagne électorale avant l’heure

Une première, Rached Ghannouchi était sur les gradins du stade de Rades, Youssef Chahed aussi. 60 000 spectateurs chauffés à bloc assistaient à cette finale de je ne sais qu’elle coupe. Des centaines de milliers de tunisiens étaient tenus en haleine devant leurs postes TV. Un tapage médiatique autour d’un match qui a relégué au second plan le marasme général dans lequel le pays est embourbé depuis voilà huit ans. Il ne fallait pas rater cette aubaine.
Aux espérances des tunisiens, on a offert l’Espérance de Bab Souika. Certes, les Tunisiens ont droits à des moments de joie et d’euphorie pour extirper leurs colères, leurs désillusions et leur amertume. Mais de là à ne leur offrir que l’illusion de joie, c’est vouloir les programmer à une soumission éternelle. Les arènes des amphithéâtres romains et le sang des gladiateurs et des esclaves qui s’y est déversé ont bien servi la destiné des tyrans romains. Les esclaves d’Amérique ont inventé leur blues. Bien que Hommes libres aujourd’hui, le blues qui nous envoûte n’a pas à ce jour, pansé leurs blessures d’anciens esclaves.
Ce soir du vendredi 9 novembre 2018, beaucoup d’islamistes Tunisiens se sont même crus à la conquête de l’Egypte pour venger le frère Morsi contre le renégat Essissi. Essissi, le renégat, n’a pas dormi cette nuit tellement la menace espérantiste était imminente aux portes de son palais !
Dans l’euphorie qui a arraché le stade de Rades de la terre pour le lever dans les cieux, Rached et Youssef sont venus pomper des voies pour les échéances électorales de 2019, avant que l’effet de l’hypnose ne se dissipe. Pour Rached c’était une opération de séduction, pour Youssef, en plus, la victoire était le soulagement du constipé condamné, pour encore un certain temps, à vivre avec des laxatifs. Et bientôt on verra Rached faire la tournée des discothèques dansant le Tango et le slow et Youssef, faire le prêche dans les mosquées.
Nous sommes aux premiers virages du Rallye Tunis 2019 et déjà la dernière ligne droite semble acquise à la formule 1 aux couleurs du Qatar Airways grâce à un travail d’équipe implacable, au milieu d’une hécatombe des voitures des autres équipes qui se croyaient dans un manège, au stand des voitures tamponneuses, sans compter que, déjà certains désertent leur écurie pour essayer de trouver place dans celle du Qatar Airways. Le plus fortuné d’entre eux n’aurait, tout au plus, que la place de la roue arrière du bolide, du côté de l’échappement.

Mounir Chebil