Turquie: l’avocate Ebru Timtik décède dans une prison d’Erdogan pour avoir réclamé un procès équitable.

Elle était poursuivie pour ce qu’elle était. Jeudi 27 août, une avocate turque, Ebru Timtik, 42 ans, est décédée en prison dans son pays. Elle avait entamé une grève de la faim 238 jours plus tôt, pour réclamer un procès équitable.

Son pouls s’est arrêté. Une avocate turque emprisonnée par le régime d’Erdogan , qui avait entamé une grève de la faim depuis 238 jours, est morte jeudi 27 août dans un hôpital d’Istanbul, a annoncé son cabinet, People’s Law Office, sur Twitter.

Un peu plus tôt, son cabinet avait indiqué que les docteurs tentaient de la réanimer par un massage cardiaque.

Ebru Timtik avait été condamnée en 2019 à plus de 13 ans de prison pour « appartenance à une organisation terroriste ». Comme le souligne l’avocat français Martin Pradel sur le réseau social, elle était en réalité poursuivie pour ses actions d’avocate.

Un appel du verdict de mars 2019 avait été rejeté en octobre et un autre appel était en cours devant la Cour suprême de Turquie. Comme son confrère Aytaç Ünsal, également en détention, Ebru Timtik s’était mise en grève de la faim pour demander un procès équitable. Les deux avocats avaient déclaré qu’ils « persisteraient dans leur grève de la faim même si elle devait entraîner leur mort ».

Les autorités turques accusent cette association d’être liée à l’organisation marxiste-léniniste radicale DHKP-C, un groupe qui a commis plusieurs attentats et est qualifié de “terroriste” par Ankara et ses alliés occidentaux.

30 kilos à sa mort

Ebru Timtik a notamment défendu la famille de Berkin Elvan, un adolescent mort en 2014 des suites de blessures reçues lors des manifestations antigouvernementales de Gezi en 2013.

Le mois dernier, un tribunal d’Istanbul avait refusé de libérer Ebru Timtik, en dépit d’un rapport médical indiquant que son état de santé ne lui permettait plus de rester en prison. Une demande similaire avait aussi été déposée en août auprès de la Cour constitutionnelle, sans succès.

Comme elle, son confrère Aytaç Ünsal est également lancé dans une grève de la faim. Au lieu d’une libération, Ebru Timtik et Aytaç Unsal avaient été transférés dans deux hôpitaux différents en juillet.

Ebru Timtik, qui ne consommait plus que de l’eau sucrée, des infusions et des vitamines au cours de sa grève de la faim, pesait 30 kg au moment de son décès, selon ses proches.

Quelques dizaines de personnes attendaient vendredi matin devant le Conseil de médecine légale d’Istanbul où le corps devrait être autopsié, selon une journaliste de l’AFP sur place.

La mort de l’avocate a indigné de nombreux élus de l’opposition. “Ebru Timtik a été envoyée à la mort sous nos yeux”, a ainsi réagi sur Twitter Sezgin Tanrikulu, député du CHP (social-démocrate). “Nous l’avons perdue à cause de la conscience aveuglée de la justice et des politiques. Son seul souhait était un procès équitable et honnête”, a-t-il ajouté.