France : Nicolas Sarkozy mis en examen pour « association de malfaiteurs »

L’ex-chef de l’Etat français est mis en examen pour la quatrième fois dans le cadre de l’affaire libyenne

Dans le cadre de l’enquête sur le financement libyen présumé de sa campagne de 2007, Nicolas Sarkozy a été inculpé pour association de malfaiteurs. Déjà mis en examen en 2018 dans cette affaire, il estime son innocence «bafouée».

L’ancien président Nicolas Sarkozy a été mis en examen à l’issue de quatre jours d’audition pour association de malfaiteurs dans l’enquête sur des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle en 2007.

L’ancien président de la République Nicolas Sarkozy, qui a été interrogé pendant quatre jours par les juges Aude Buresi et Marc Sommerer, a de nouveau été mis en examen dans le cadre de l’affaire du financement libyen supposé de sa campagne présidentielle de 2007, annonce le Parquet national financier ce vendredi 16 octobre

Cette nouvelle poursuite, révélée par le site d’information en ligne, est la quatrième dans ce dossier pour l’ancien président de la République, qui s’était dit victime d’un «complot» après les mises en examen prononcées en mars 2018 pour «corruption passive», «recel de détournement de fonds publics» et «financement illégal de campagne».

«J’ai appris cette nouvelle mise en examen avec la plus grande stupéfaction […] Mon innocence est à nouveau bafouée par une décision qui ne rapporte pas la moindre preuve d’un quelconque financement illicite», a-t-il commenté sur Facebook.

En 2011, la France, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, figurait parmi les principaux pays participants d’une opération militaire de l’OTAN en Libye, qui s’est soldée par la mort du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi.

« La procédure suit son cours »

« Chacun voit bien qu’il s’agit d’une décision sans précédent en cohérence avec les investigation réalisées. La procédure suit son cours », a pour sa part réagi Me Vincent Brengarth, l’avocat de l’association anticorruption Sherpa qui est partie civile dans ce dossier.

Le 31 janvier, les magistrats avaient mis en examen pour « association de malfaiteurs » l’un des anciens collaborateurs de Nicolas Sarkozy, Thierry Gaubert, soupçonné d’avoir touché des fonds provenant du régime libyen de Kadhafi qui auraient pu alimenter la campagne de l’ancien chef de l’État.

Après ses mises en examen en mars 2018, Nicolas Sarkozy avait également été placé sous contrôle judiciaire.

Lors de sa dernière audition, en juin 2019, il avait dénoncé un « complot » puis refusé de répondre aux questions des magistrats instructeurs, le temps de l’examen de recours visant à faire annuler l’enquête.

Mais un arrêt de la cour d’appel de Paris du 24 septembre a permis de relancer celle-ci. La chambre de l’instruction, chargée d’étudier les recours contre les actes d’instruction, avait été saisie par l’ex-chef de l’État et ses anciens ministres Claude Guéant, Éric Woerth et Brice Hortefeux, ainsi que l’homme d’affaires Alexandre Djouhri sur toute une série de nullités. Nicolas Sarkozy invoquait notamment son immunité présidentielle, reprochait aux juges d’être sortis du périmètre autorisé de l’enquête ou avançait que le détournement de fonds publics d’un pays étranger, qui lui est reproché, est un délit qui n’existe pas dans la loi française.

La cour d’appel de Paris a rejeté l’essentiel de ces recours, et a ainsi presque entièrement validé les investigations lancées il y a huit ans dans cette affaire aux multiples ramifications.

Nicolas Sarkozy s’est pourvu en cassation contre cette décision, tout comme Éric Woerth, Claude Guéant et Alexandre Djouhri, a indiqué une source judiciaire citée par l’AFP.

Deux procès à venir

L’enquête avait été ouverte après la publication par Mediapart en 2012, dans l’entre-deux tours de la présidentielle, d’un document censé prouver que la campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy avait été financée par le colonel  Mouammar Kadhafi.

Témoignages de dignitaires libyens, notes des services secrets de Tripoli, accusations d’un intermédiaire… En sept ans de travail, les magistrats ont réuni une somme d’indices troublants qui ont donné corps à la thèse selon laquelle la campagne de l’ex-président français avait été financée par le régime de Mouammar Kadhafi.

Toutefois, aucune preuve matérielle indiscutable n’a pour l’heure été trouvée, même si des mouvements de fonds suspects ont conduit à neuf mises en examen à ce jour.

En novembre 2016, l’homme d’affaires Ziad Takieddine – un des mis en examen dans cette affaire et en fuite depuis sa condamnation en juin dans le volet financier de l’affaire Karachi – avait affirmé avoir remis entre fin 2006 et début 2007 cinq millions d’euros à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, et à son directeur de cabinet Claude Guéant.

Outre ce dossier, dans lequel les investigations sont encore en cours, l’ex-chef de l’État doit être jugé du 23 novembre au 10 décembre pour « corruption » dans l’affaire dite des « écoutes » : il est soupçonné d’avoir tenté, avec son avocat Thierry Herzog, d’obtenir d’un haut magistrat, Gilbert Azibert, des informations couvertes par le secret dans une procédure judiciaire.

Nicolas Sarkozy doit également être jugé du 17 mars au 15 avril 2021 pour le financement illégal de son autre campagne présidentielle, celle de 2012, dans le cadre de l’affaire Bygmalion : il lui est reproché le dépassement du plafond de dépenses de campagne.