Le président américain Donald Trump est prêt à « ralentir » le retrait des troupes américaines de Syrie pour vaincre définitivement le groupe terroriste État islamique (EI, également appelé Daech), a assuré dimanche 30 décembre un de ses proches, le sénateur républicain Lindsey Graham.
Le parlementaire, qui avait manifesté ses inquiétudes dans la matinée au sujet de ce désengagement, est sorti « rassuré » d’un déjeuner avec le président Trump.
« Le président est déterminé à faire en sorte que, lorsque nous quitterons la Syrie, Daech soit complètement vaincu. » Lindsey Graham, sénateur républicain
« Le président comprend qu’on a besoin de finir le travail », a-t-il déclaré à la presse en sortant de la Maison-Blanche. « Nous allons ralentir les choses d’une manière intelligente », a-t-il ajouté.
Donald Trump a ordonné récemment le retrait total des quelque 2000 soldats américains actuellement déployés dans le nord de la Syrie, essentiellement des forces spéciales présentes pour combattre Daech et entraîner les forces locales dans les zones reprises aux jihadistes.
Le milliardaire républicain a pris cette décision, bien que de hauts responsables militaires américains ont multiplié les mises en garde contre un retrait précipité qui laisserait la voie libre en Syrie aux alliés du régime de Bachar Al-Assad, à savoir la Russie, grande rivale des États-Unis, et l’Iran, bête noire de l’administration Trump.
Crainte d’un « massacre »
Lindsey Graham avait qualifié cette décision d’« énorme erreur ». « Je vais lui demander de s’asseoir avec ses généraux et de reconsidérer la manière de faire ça. De ralentir. De nous assurer que nous fassions ça bien et que l’EI ne revienne jamais », avait-il dit sur CNN avant leur déjeuner.
« Si nous partons maintenant, les Kurdes vont être massacrés », avait craint le sénateur, membre de la commission sur les forces armées.
La Turquie menace de lancer une offensive contre la milice kurde YPG, qui se bat avec l’appui de Washington contre les djihadistes dans le nord de la Syrie. Ankara l’accuse d’être une extension du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène une guérilla en Turquie depuis 1984.
Le président Trump « est conscient du problème, il a promis de parler à la Turquie pour qu’il y ait une zone tampon », a déclaré M. Graham après leur rencontre. « La dernière chose que nous voulons c’est une guerre entre la Turquie et les Kurdes, qui enlèverait la pression sur Daech ».
Coordination entre Moscou et Ankara
La Russie et la Turquie ont convenu samedi, au cours de pourparlers à Moscou, de « coordonner » leurs actions sur le terrain en Syrie dans le contexte du retrait annoncé des forces américaines, qui provoque déjà des revirements d’alliances.
La décision de Donald Trump a fait bouger les lignes changeantes d’un conflit dont la complexité n’a cessé de s’accroître depuis 2011 puisque les Kurdes, soutenus par les troupes américaines jusqu’alors et menacés par la Turquie, ont appelé à l’aide l’armée de Bachar Al-Assad, qui est entrée vendredi dans une région du nord.
Cette avancée du régime syrien a réjoui son allié russe, mais provoqué la colère d’Ankara et c’est dans ce contexte qu’une délégation turque s’est rendue samedi à Moscou pour des discussions réunissant ministres des Affaires étrangères, de la Défense et responsables du renseignement des deux pays.
« Nous sommes tombés d’accord sur le fait que les représentants militaires russes et turcs sur le terrain vont continuer de coordonner leurs actions dans ce nouveau contexte avec pour but d’éradiquer la menace terroriste en Syrie », a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov à l’issue des pourparlers.
« Nous avons discuté de la manière dont nous allons coordonner notre travail en commun dans le contexte » du départ des Américains, a confirmé son homologue turc Mevlüt Cavusoglu. « Nous avons le désir commun de nettoyer le territoire syrien de toute organisation terroriste ».
M. Lavrov s’est dit « optimiste » après ces discussions qui ont notamment impliqué, outre M. Cavusoglu, les ministres turc et russe de la Défense Hulusi Akar et Sergueï Choïgou.
Ces pourparlers interviennent après l’annonce la semaine dernière par le président Donald Trump du retrait des militaires américains de Syrie.
Alliance entre Kurdes et l’armée syrienne
Illustration des revirements d’alliances que cette décision provoque : l’armée syrienne est entrée vendredi dans la région septentrionale de Minbej, en réponse à un appel à l’aide des forces kurdes qui font face à des menaces d’offensive de la Turquie.
C’est la première fois en six ans que les forces syriennes retournent près de Minbej, sur fond de multiplication, avec l’aide cruciale de l’allié russe, des victoires militaires du régime de Damas qui semble sur la bonne voie pour briser son isolement diplomatique.
Avec agences