Le gouvernement britannique a financé une campagne médiatique pour laquelle il a choisi l’agence de publicité M & C Saatchi afin de maquiller Youssef Chahed et promouvoir l’adhésion des électeurs tunisiens aux réformes impopulaires menées par son gouvernement
« Le gouvernement britannique a engagé l’agence internationale de communication, M & C Saatchi pour mener une campagne médiatique en faveur du gouvernement Youssef Chahed dans le but de gagner des voix pour les réformes qui ont déclenché de vives manifestations dans l’état nord-africain depuis le « printemps » arabe » rapporte le journal britannique « The Guardian » dans son édition du 2 juillet 2018
L’agence de pub, a été engagée pour mener une campagne « ciblée sur le public tunisien », selon des documents cités par The Guardian . « Ses objectifs sont de sensibiliser davantage le public sur le rôle du gouvernement dans la planification et la mise en œuvre des réformes économiques entreprises dans le cadre d’un plan soutenu par le Fond Monétaire International ( FMI ) visant à réduire son déficit budgétaire et stimuler la croissance » précise la même source.
Une première phase de la campagne Saatchi, qui implique l’agence basée à Tunis, ciblera les Tunisiens âgés de 18 à 35 ans « initiateurs des protestations ». Cette action viserait donc à soutenir le gouvernement Chahed, et expliquer la nécessité des réformes entreprises. « Les jeunes ayant vivement contesté l’augmentation les prix des denrées de base et introduction de nouvelles taxes », une initiative menée « sous des pressions pour mener à bien les réformes liées au conditions du prêt du FMI s’élevant à 2,9 milliards de dollars ».
La rétribution de Saatchi sera assurée par le Fonds secret pour les conflits, la sécurité et la stabilité (CSSF), créé sous les auspices de plusieurs départements gouvernementaux britanniques clés, dont le département des Affaires étrangères et celui du Développement international, révèle The Guardian.
Ce Fonds est toutefois critiqué en Bretagne, pour manque de transparence souligne le journal. « Il a suscité de vives inquiétudes parmi les députés par rapport à un manque de transparence, de responsabilité et de leadership » .
Cette initiative en faveur de la Tunisie est également contraire au mouvement du Royaume-Uni visant à concentrer davantage de ressources sur le Sahel africain, « identifié comme un terreau fertile pour l’extrémisme et la source des migrants clandestins vers l’Europe ».
Lloyd Russell-Moyle, député travailliste au comité de développement international du Parlement, aurait même déclaré : « Je ne vois pas de meilleur exemple du cynisme de ce gouvernement que de financer une campagne de Com pour soutenir l’Etat tunisien, quand on prétend promouvoir la paix et la sécurité à l’étranger ».
« Le gouvernement ne dira ni au public ni au Parlement ce que ce fonds, dont le budget est de plus de 1 milliard de livres sterling dépensé et le peu d’éléments de preuves dont nous disposons prouve qu’on est pourri jusqu’à la moelle », ajoutant qu’ « à la lumière de ces nouvelles allégations, il semble prudent de faire cesser le fonds en attendant les conclusions de l’enquête. »
Asad Rehman, directeur exécutif de l’organisation caritative « War on Want », a déclaré que les projets de cette nature menés en Tunisie “semblent soutenir davantage les gouvernements et leurs relations publiques que les causes des protestations, qui prennent profondément racine dans des problèmes économiques en lien avec les inégalités ».
“Les gens seraient vraiment choqués de savoir une fois de plus – qu’il s’agisse d’initiative de finance publique (PFI) ou d’autre chose – que des entreprises britanniques sont amenées à aider les gouvernements à imposer des politiques qui sont fortement contestées, créant plus de friction et conduisant finalement à une réponse sécurisée dès lors que les gens protestent contre eux. “
Illustration : Youssef Chahed tête baissée face à Christine Lagarde patronne du FMI qui pose ses conditions