Professeur Mahjoub Aouni donne un point de vu sur le Coronavirus

Du mois de décembre 2019 au mois d’août 2020, le Sars-Cov-2 a connu deux phases caractérisant son évolution avec deux profils épidemiologiques bien distincts.
Première phase : émergence d’un génotype particulièrement pathogène chez l’homme contrairement à ce qu’on sait sur cette famille virale  » Coronvirus », ce génotype, doté d’ un pouvoir infectieux très important évoluant dans un environnement vierge (sans statut immunitaire spécifique) , va conquérir dans un temps record la totalité du globe, marquant ainsi sa première phase de  » colonisation ». Phase où la relation
 » hôte/parasite » est marquée par une supériorité du virus dans ces interactions lors d’une infection, garantissant ainsi son implantation avec succès dans les différentes communautés infectées . Les profils phénotypiques des souches circulantes à cette période sont caractérisés par une pathogenicité et une infectiosite très importantes. Ce comportement a été à l’origine de la grande dissémination virale et à un impact sanitaire marqué par une sévérité de l’infection, d’où le nombre d’hospitalisations avec la mortalité élevée notée chez les groupes vulnérables.
2ème phase : elle s’annonce, selon les régions à partir du 6ème mois après les premiers cas déclarés. C’est la phase d’adaptation. Ce virus, après sa grande diffusion planétaire, ses nombreux passages inter-humains , ses mutations ponctuelles adaptatives, acquiert une certaine forme stabilisée et adaptée à
l’hôte (Une interaction  » hôte/parasite équilibrée) . En effet, durant cette phase, le virus continue à se multiplier plus activement (avec un cycle productif plus important, marqué par une charge virale assez importante provoquant ainsi une importante contagiosité. Ce comportement explique le large spectre d’hôtes, notée durant cette 2ème phase de l’évolution du virus, avec différents profils (symptomatiques et asymptomatiques). Comparé à la première phase, la pathogenicité des souches circulantes, durant cette 2ème phase, sont moins pathogènes (beaucoup de cas asymptomatiques et peu de cas sévères et moins de mortalité) . Il est à noter que durant cette phase, toutes les tranches d’âge sont touchées sans trop de dégâts.
le rebond estival qui coïncide avec cette 2ème phase de l’évolution normale du pathogène (virus), laisse penser à une 2ème vague du virus or ce n’est pas le cas.
Au cours de son cycle évolutif lors d’une épidémie, tous les virus, surtout les virus à ARN, subissent des mutations généralement ponctuelles au cours de la réplication de leur génome. Mutations aboutissant à des groupes de gènes liés, adaptatifs favorisant une situation d’équilibre de l’intération (le virus se multiplie sans perdre son hôte)
D’ailleurs la stratégie du virus est la conservation de l’hôte pour assurer sa dissémination.
On parle actuellement , des souches caractérisées par une mutation D614G au niveau du gène codant pour la protéine de surface de l’enveloppe , responsable de l’attachement du virus à son récepteur cellulaire facilitant la pénétration de son génome pour engager son cycle replicatif. Mutation qui semble réduire la pathogenicité et augmenter l’infectiosité de la majorité des souches porteuses de cette mutation, actuellement en circulation dominante, dans plusieurs pays, y compris la Tunisie.
Donc on est probablement dans cette situation d’équilibre adaptatif où l’hôte acquiert aussi de nouveaux caractères lui permettant de maintenir cette relation de stabilité en ayant, après les 6 mois un statut immunitaire (humoral) et une sensibilisation du système à médiation cellulaire suffisants contrôlant la pathogenicité du virus ( ce qui explique peut être le nombre de porteurs sains constaté ces dernières semaines.
Enfin, cet équilibre évolutif, annonce une longue phase de cohabitation qui va durer sans trop de dégâts.Reste bien évidemment les cas extrêmes avec des facteurs aggravants qui peuvent avoir des situations assez délicates.
Mais je pense pas qu’on aura un vaccin qui va éradiquer ce virus. Il va rester parmi nous mais bien contrôlé moyennant des mesures qui vont entrer dans nos habitudes quotidiennes.

Professeur Mahjoub Aouni