Le Qatar reconnaît la mort de «400 à 500 travailleurs migrants» sur les chantiers de la coupe du monde

Le directeur du tournoi Hassan al-Thawadi a donné une nouvelle estimation officielle du nombre total de migrants morts entre 2010 et 2022 au Qatar.

La Coupe du monde de football au Qatar a soulevé de nombreuses critiques et appels au boycott, notamment en Europe, en raison des coûts écologiques, financiers et humains liés à l’organisation de cette compétition dans ce riche émirat gazier du Golfe. En février 2021, le journal britannique The Guardian, publiait ainsi une enquête révélant que 6500 migrants (Indiens, Pakistanais, Sri-Lankais, Bangladais., Népalais..) seraient morts en construisant les infrastructures et les stades de football pour cette Coupe du monde depuis 2010.

De son côté, Doha a toujours réfuté ces chiffres, avançant des chiffres officiels bien moins importants de 37 décès de migrants au Qatar entre 2010 et 2022, toutes causes de mortalité confondues. Or, dans une interview donnée le 28 novembre au présentateur britannique Piers Morgan, le directeur de l’organisation du mondial, Hassan al-Thawadi, a évoqué un chiffre supérieur aux précédents chiffres officiels puisque «400 à 500 migrants seraient morts au total» au Qatar selon lui sur cette période.

En réalité, Hassan al-Thawadi maintient la position officielle du Qatar, mais la nuance. Il distingue les décès de migrants lors de la construction des stades et les migrants décédés lors de la construction d’autres infrastructures. Selon lui, trois migrants seraient morts en construisant les stades de football. Trente-sept migrants, travaillant aussi sur les chantiers des stades seraient également morts, mais en dehors de leurs heures de travail. «Nous avons toujours été transparents là-dessus», a-t-il déclaré, avant d’ajouter que les chiffres de «400 ou 500 migrants» décédés correspondaient au total de morts pour la construction de l’ensemble des infrastructures (hôtels, routes, restaurants…) nécessaires pour accueillir la Coupe du monde.

Sur les critiques portées envers le Qatar, il a distingué les critiques «constructives» qui auraient permis à son pays «de dialoguer et de s’améliorer en discutant avec des partenaires» et les critiques fondées sur la «désinformation», qui n’auraient rien fait avancer malgré «les demandes de dialogue que nous avons effectuées».

Le Qatar est «très fier» d’accueillir cette Coupe du monde

Au-delà de ces révélations, Hassan al-Thawadi a répondu à d’autres questions plus générales sur le déroulement actuel de la Coupe du monde. Il a déclaré que le Qatar était «très fier d’accueillir cette Coupe du monde». «Quand vous regardez les gens dans la rue, venant du monde entier et le spectacle donné sur les terrains de football, c’est phénoménal. Il s’agit de la première Coupe du monde organisée dans le monde arabe, la victoire de l’Arabie saoudite contre l’Argentine et du Maroc contre la Belgique ont été incroyables pour tout le monde ici», a-t-il complété.

Selon le directeur du tournoi, entre 2010 et 2022, le Qatar a fait évoluer son droit du travail en partenariat avec les organisations syndicales allemandes et suisses pour améliorer les standards de santé et de sécurité pour les travailleurs migrants. «Je pense que le besoin de réformes était nécessaire. Ces réformes n’ont pas été faites uniquement parce que nous devions organiser la Coupe du monde, ce sont des progrès que nous devions réaliser avant même d’avoir obtenu la Coupe du monde en 2010», a-t-il précisé, ajoutant que le mondial est un «catalyseur ayant permis d’accélérer ces réformes».

Interrogé à propos des joueurs voulant porter un brassard de soutien aux personnes LGBT pendant les matchs, Hassan al-Thawadi a déclaré que ces types de mobilisation «le dérangeaient car elles sont dirigées contre le Qatar, même si d’autre part cela ne le dérangeait pas que des Européens fassent ce type d’actions en Europe», précisant ensuite que «tout le monde pouvait venir avec sa culture au Qatar pour échanger avec toutes les cultures pendant le mondial avec un respect mutuel». Selon lui, «les homosexuels sont les bienvenus comme tout le monde au Qatar pour visiter le pays comme pour y vivre», mais «l’affichage en public» ne fait pas partie de la culture du pays.

Hassan al-Thawadi a justifié cette position en opposant les valeurs occidentales qui seraient d’abord «focalisées sur les droits individuels» et les valeurs du monde arabe et du Moyen-Orient qui seraient d’abord «focalisées sur les valeurs religieuses». De son point de vue, malgré cette «opposition» de valeurs, cette Coupe du monde prouve que «nous pouvons trouver un moyen de coexister».