Je ne disserterai pas longtemps sur la culpabilité ou l’innocence de ce bonhomme , devenu Ministre de l’environnement par accident, Mustapha El Aroui . La justice s’en chargera. Euh…si elle daigne bien s’en charger un jour. Car pour le moment , elle semble oublier aslan, qu’elle l’a jeté dans une prison sordide balayée par un vent glacial, enfouie dans le noir au beau milieu des champs d’oliveraie de Messaadine . Que leur importe ,ces juges, que cet illustre inconnu de ministre moisisse dans une cellule étroite et sordide aux murs dégoulinant dégoulinant de crasse et suintant d’humidité verdâtre. Ministre ? Non , un simple détenu de droit commun maintenant dont personne ne parle, jeté aux oubliettes. Ministre ? Peut être oui si, tiens ! Mais juste pour la bonne cause , servir leur cause. La galerie avait besoin de la tête d’un ministre pour évacuer la pression qu’ils subissent. Qui mieux que cet illustre inconnu , sans soutiens , sans partis, sans kotla parlementaire pouvait mieux que lui faire l’affaire.
Il le savait depuis deux semaines, ce ministre devenu un petit enfant qui ne dormait plus, la peur au ventre, grillant cibiche sur cibiche, devinant les dents d’acier de cette grosse machine infernale et froide qui se posaient sur sa chair fiévreuse, toute en sueurs attendant le signal pour le mordre et l’écrabouiller. On avait besoin de la tête de ministre. Et ça urgeait. Quand la fourgonnette cellule le transportait de Tunis à Sousse, Mustapha Laroui savait qu’il n’était plus Ministre, ni citoyen d’ailleurs. Il éprouvait même un léger soulagement que cela soit fini et somnolait finalement , bercé par le ronronnement du moteur de la fourgonnette cellule, la fourgonnette piège qui se refermait sur lui. Il ne se doutait guère du bruit que son arrestation faisait dehors. Le peuple exultait. Les plateaux discutaillaient et ces journaleux se vantaient même d’avoir la tête d’un ministre qui leur fut offerte sur un plateau. Qu’importe qu’ils ne le connaissent ni de père , ni de mère. L’essentiel c’est qu’il revêtait le costard d’un ministre, fût il pour un jour, fût il un ministre éphémère qui n’aura duré que 3 mois , trois mois d’une bourrasque de carrière. d’une intrusion dans ce monde froid et glacial sans pitié d’une mafia qui s’entretue en tirant sur tout ce qui bouge.
Et comme un malheur n’arrive jamais seul, la guerre des clans aboutit le lendemain à l’arrestation d’un gros poisson pourri , d’un vrai requin de l’arnaque politique et de la télé N.K. Le ministre éphémère , le temps d’un sacrifice, est littéralement oublié, seul dans sa cellule. Oublié, grelottant de froid, chialant comme un môme. Personne n’en parle. Toute la population vaquait à ses occupations. Toutes les télés, toutes les koutall, tous les parlementaires défendaient N.K. bec et oncles dehors depuis une semaine. Mustapha Laroui, ministre d’un jour, , lui, chiale toujours, depuis une semaine, dans sa cellule aux murs dégoulinant de crasse et suintant d’humidité. Personne n’en parle, personne ne le défend, Innocent ou coupable, on s’en fout. Personne ne le juge, même pas le juge qui l’a jeté en prison . Il n’intéresse plus personne maintenant. Ni le gouvernement dont il fait partie, ni le Président qui ne sait plus pourquoi il l’a nommé. Ce n’est qu’un ministre d’un jour.
L’agitateur