En délaissant les interventions non urgentes pour lutter contre la covid-19, de nombreux hôpitaux américains ont perdu beaucoup de revenus. Certains ont donc choisi de réduire les effectifs
« Une semaine, nous sommes des héros. La semaine suivante, nous sommes sans emploi et aux prises avec l’incertitude », se désole Jason Bradford.
Jusqu’à récemment, ce travailleur de la santé participait quotidiennement à la lutte contre la COVID-19 dans un hôpital privé de la région de Détroit, l’une des zones les plus touchées du pays.
Son poste consistait à recueillir les informations sur les patients admis à l’hôpital, notamment les détails de leur assurance maladie. Jason était donc l’une des premières personnes que des malades, dont certains présentaient des symptômes liés à la COVID-19, rencontraient à leur arrivée au centre hospitalier.
Mardi, Beaumont Health, le groupe qui gère son hôpital, a confirmé plus de 2400 mises à pied et l’élimination de 450 emplois, dont le sien.
Son hôpital, qui traitait exclusivement des patients atteints du coronavirus, a même cessé ses activités. Les patients qui y séjournaient ont été transférés vers d’autres centres de santé.
« J’étais encore plus en colère […] de savoir que l’hôpital fermait ses portes à la communauté en pleine pandémie. » Jason Bradford, ancien spécialiste d’accès aux patients
Le maire du comté de Wayne, où la COVID-19 a fait plus de 500 morts, ne cache pas non plus sa frustration. Il a même demandé la tenue d’une enquête criminelle sur cette décision.
Beaumont Health, qui évoque une fermeture temporaire de cet établissement, explique que des pertes de 54 millions de dollars depuis le début de l’année ont rendu les restructurations inévitables.
La consolation, c’est que nous avons des prestations d’assurance-emploi améliorées pour nous aider à traverser cette crise, a déclaré dans un message vidéo aux employés le président du groupe, John Fox, qui assure avoir lui-même réduit de 70 % son salaire de base.
Des revenus en chute libre
Le phénomène ne se limite pas au Michigan.
Cette semaine seulement, des médias ont signalé que des centres de santé publics et privés des États de New York, du Minnesota, de l’Arizona, du Wyoming, du Dakota du Sud et de la Floride ont procédé à des compressions et des réductions de salaire. Ces mesures visent des employés administratifs, mais parfois aussi des travailleurs de la santé.
En Pennsylvanie, la présidente de l’Alliance des infirmières et des professionnels de la santé, Maureen May, explique que certains membres qui travaillent dans des départements moins touchés par la pandémie ont été formés pour travailler dans des unités de COVID-19, mais que d’autres ont été mis à pied.
Dans l’hôpital privé de Philadelphie où cette dirigeante syndicale travaille, des compressions ont également été évoquées.
« C’est angoissant et frustrant pour un travailleur de la santé d’apprendre que son emploi est menacé alors qu’il vient de participer malgré lui à cette guerre. » Maureen May, présidente de l’Alliance des infirmières
Dans son État, les hôpitaux s’attendent à ce que la crise cause des pertes de 10 milliards de dollars cette année.
Aux États-Unis, où moins de 20 % des hôpitaux communautaires sont publics, les revenus des centres de santé dépendent beaucoup des opérations facturées aux patients.
Or, depuis plus d’un mois, presque toutes les procédures non urgentes ont été interrompues pour se concentrer sur la lutte contre la COVID-19, et ce, même dans les régions les moins touchées.
Source : Radio Canada