« Le doulos », un polar stylisé

« Le doulos » , épiphanie du cinéma melvillien.

Je viens de revoir « Le doulos », une adaptation du roman de Pierre Lesou par Jean-Pierre Melville. Epoustouflant ! Ce film nous plonge dans le milieu des truands parisiens de l’après-guerre. Il est servi par des acteurs formidables et dirigés avec maestria. L’interprétation de Jean-Paul Belmondo est vraiment époustouflante.

L’histoire est toute simple. Maurice Faugel (Serge Reggiani), bandit solitaire, est libéré après avoir purgé plusieurs années de prison. Meurtri par l’assassinat de sa femme, il va bientôt se faire justice en tuant un receleur, avant de lui voler son butin et de le planquer sous terre près d’un réverbère. Il prépare un casse avec son complice Rémy (Philippe Nahon, mort en avril dernier) et demande l’aide de Silien (Jean-Paul Belmondo) pour le matériel. Ce dernier, appelé le doulos (indicateur de police en argot), est craint par tous car on le prend pour une balance.

Le Doulos emprunte tous les codes du film policier à l’ancienne : l’atmosphère tamisée, le commissariat avec des flics en costumes, les imperméables gris et les chapeaux noirs, les personnages qui ont une bonne descente d’alcool, les cigarettes frimeuses, les traîtrises en tout genre, les femmes dociles et en même temps enclines à la traîtrise, la musique jazz qui accompagne tout le film, le club de jazz faussement huppé…

Dans Le doulos, tous les principes inhérents au milieu convergent vers un code d’honneur qui légitime les actes les plus sordides en cas de trahison. Toute l’histoire repose sur la méfiance dont font preuve les bandits à l’égard des doulos, soit à l’égard des truands qui retournent leurs vestes en informant la police et qui, une fois démasqués, se retrouvent condamnés à mort par leurs pairs.

Le doulos est un polar stylisé. En effet, même si l’admiration que portait Jean-Pierre Melville pour le cinéma américain de cette époque est très sensible dans ce film, l’empreinte du cinéma français y est particulièrement évidente. Comme tous les films de Melville, Le doulos est marqué par la rigueur de la construction, mais aussi par la solidité de la direction d’acteurs et les thèmes qu’il développe : la ferveur de l’amitié virile, la solitude des héros… Bref, manifaïke !

Pierrot LeFou