À propos du feuilleton Foundou : Trêve de pleurnicheries !

À propos du feuilleton Foundou qui passe sur la chaîne El Hiwar…

Par-delà la qualité de la fiction dont il y aurait beaucoup de choses à dire, Facebook se transforme chaque soir en mur des lamentations à cause de Foundou. Les uns chialent en arguant que ce feuilleton comporte des scènes qui incitent à la violence à l’encontre des femmes, les autres estiment que telle scène porte atteinte à l’image de leur profession, sans parler des culs-bénis qui s’indignent chaque année à la vue d’un verre de whisky ou d’un maillot de bain deux pièces et la liste des indignés est encore longue et s’allonge chaque jour…

Non seulement c’est le genre de scènes que l’on voit tous les jours dans les séries et films américains qui passent sur MBC et Netflix – Nidal Saadi aurait dû crier « fuck ! » dans certaines scènes, ça nous aurait éclairé sur la source d’inspiration de la réalisatrice de Foundou -, mais, en plus, un tel feuilleton n’est pas destiné à sensibiliser les gens aux questions sociales, à lutter contre la scarification ou la violence à l’encontre des femmes, et encore moins à éduquer la populace. C’est une fiction qui s’inspire de certains phénomènes sociaux.

Y en a marre de voir les Tunisiens crier au scandale chaque année et prôner la censure dès que quelque chose les dérange. Les uns font de l’esclandre et s’érigent en apôtres de la morale et des bonnes mœurs, les autres montent sur leurs grands chevaux dès qu’ils estiment que tel ou tel feuilleton représente une menace pour les femmes, chaque corps de métier se scandalise dès que leur profession apparaît sous un jour peu favorable, etc. Cette année, même les homosexuels se sont mêlés au concert des lamentations. Malheur à ceux qui ne s’indignent pas !

Nos fictions étouffent déjà sous le poids des interdits et tabous moraux et religieux liés à la culture arabo-musulmane, si l’on se met aussi à juger les productions actuelles à travers le prisme des idéologies qui font rage dans les pays occidentaux, il n’en restera plus grand-chose. Bientôt, réalisateurs, producteurs et scénaristes tunisiens travailleront avec une seule idée en tête : ne pas réveiller les susceptibilités des uns et des autres.
Trêve de pleurnicheries !

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Le talon d’Achille

D’aucuns estiment que le scénario est le talon d’Achille des feuilletons tunisiens. En réalité, ce grief n’est pas dénué de fondement. La scénariste de Foundou, par exemple, est rapidement arrivée à bout de souffle. Elle a tout donné au début et n’avait presque plus rien à dire au bout du troisième épisode. C’est le cas de la plupart des scénarios tunisiens. Ils n’arrivent pas à tenir plus de trois ou quatre épisodes. Ensuite, ça devient du remplissage. On commence alors à tourner en rond et les épisodes s’allongent comme un élastique incassable.

Dans le cas de Foundou, malgré quelques dialogues intéressants et les répliques bien senties sur les problèmes liés à l’insertion sociale et à la stigmatisation des anciens détenus, la scénariste a essayé de nous faire patienter à l’aide de scènes larmoyantes et d’épanchements de cœur à n’en plus finir, mais aussi à l’aide de péripéties peu ingénieuses qui confinent souvent à la mièvrerie, jusqu’au dernier épisode pour nous révéler son « coup de théâtre » qui n’en est pas un.

En outre, l’on comprend en regardant Foundou que la scénariste-réalisatrice n’est pas cinéphile et que son imagination a été forgée de toutes pièces par les productions américaines de qualité médiocre. D’ailleurs, les protagonistes de ce feuilleton reproduisent les mimiques et les tics des acteurs américains ; ce qui confère un aspect un peu ridicule à cette fiction et lui ôte toute authenticité. Certes, Saoussen Jomni a fait preuve d’une très bonne maîtrise technique dans Foundou et a offert au public un « produit » intéressant sur le plan esthétique. Mais, pour réaliser un bon feuilleton, il faut plus que ça…

Pierrot LeFou