Dans une tribune publiée lundi 26 mai dans Libération, 300 écrivains francophones , dont deux prix Nobel de littérature , appellent à qualifier la situation à Gaza de « génocide » et demandent un cessez-le-feu immédiat.
« Notre responsabilité collective est engagée. Nous, écrivains et écrivaines d’expression française, avons trop tardé à parler d’une seule voix (…). Aujourd’hui, c’est au nom de notre métier que nous prenons la parole – pour parler aussi des nôtres ». C’est en ces termes que 300 écrivains et écrivaines francophones, parmi lesquels Nicolas Mathieu, Neige Sinno, Vanessa Springora, Virginie Despentes, Annie Ernaux, Abdellah Taïa, Alain Damasio ou encore Gaël Faye, se sont exprimés, lundi 26 mai, dans une tribune publiée dans le journal Libération et initiée par l’écrivain Karim Kattan.
S’alignant sur le constat de « juristes internationaux et d’organisations de protection des droits humains », ces derniers exhortent à qualifier de « génocide » la situation à Gaza. Ils exigent également la mise en place de sanctions contre Israël, la libération des otages israéliens et appellent à « un cessez-le-feu immédiat ».
Nommer la guerre à Gaza
« Israël tue sans relâche des Palestiniens et des Palestiniennes, par dizaines, chaque jour. Parmi eux, nos confrères et consœurs : les écrivains et écrivaines de Gaza », poursuivent-ils, faisant allusion à l’intensification des opérations meurtrièrres menées par l’armée Israëlienne depuis l’attaque perpétrée par le Hamas le 7 octobre 2023.
Dénonçant les « intentions ouvertement génocidaires » dans les déclarations de différents ministres israéliens, les écrivains affirment que « la qualification de “génocide” pour décrire ce qu’il se passe à Gaza ne fait plus débat », reprenant ainsi les termes de plusieurs juristes, d’organisations internationales ou encore d’experts de l’ONU qui parlent d’une « destruction implacable de la vie à Gaza ».
« Une mort est aussi une censure »
Mais pourquoi ces auteurs prennent-ils la parole ? « Parce qu’en tuant un écrivain ou une écrivaine, c’est une culture, une liberté, un témoignage, une archive que l’on efface. C’est tout un corpus qu’on oblitère et un silence qu’on impose. Car une mort est aussi une censure », déclarent-ils rappelant le décès de la poétesse palestinienne Hiba Abu Nada, tuée par les bombardements israéliens en octobre 2023.
Sans jamais minimiser l’attaque du 7 octobre 2023 qu’ils qualifient de « crimes de guerre et contre l’humanité », les signataires insistent sur la nécessité de « nommer le réel » et de reprendre leur pouvoir sur les mots, au nom de leur profession. « Trop souvent, les mots ont servi à justifier l’injustifiable, nier l’indéniable, soutenir l’insoutenable. Trop souvent, aussi, les mots justes, ceux qui importaient, ont été éradiqués avec celles et ceux qui auraient pu les écrire », écrivent-ils.
Un appel collectif à un cessez-le-feu immédiat
Avec cette prise de position collective, ils exigent que « soient imposées des sanctions à l’État d’Israël » et demandent « un cessez-le-feu immédiat – qui garantisse la sécurité et la justice pour les Palestiniens, la libération des otages israéliens, celle des milliers de prisonniers palestiniens détenus arbitrairement dans les prisons israéliennes », martelant que « face à ce moment historique, nous pouvons détourner le regard. Ou bien nous montrer à la hauteur de la tâche qui s’impose à nous. »