La nouvelle direction syrienne a donné son feu vert à la remise des effets personnels de l’espion israélien Eli Cohen, mort depuis longtemps, à Israël dans le but d’apaiser l’hostilité israélienne et de manifester sa bonne volonté auprès du président américain Donald Trump, ont confié à Reuters trois sources proches du dossier.
Israël a annoncé , dimanche 19 mai , la récupération d’une collection de documents, photographies et objets personnels liés à Cohen, précisant que son agence de renseignement, le Mossad, avait collaboré avec une agence de renseignement étrangère non identifiée pour obtenir ce matériel.
Cependant, une source sécuritaire syrienne, un conseiller du président syrien Ahmed al-Sharaa, ainsi qu’une personne au fait des discussions informelles entre les deux pays, ont affirmé que l’archive en question avait en réalité été proposée à Israël comme geste indirect de la part de Sharaa, dans sa volonté d’apaiser les tensions et de gagner la confiance de Donald Trump.
Cohen, pendu en 1965 sur une place du centre de Damas après avoir infiltré l’élite politique syrienne, reste considéré comme un héros en Israël et le plus célèbre espion du Mossad, pour avoir découvert des secrets militaires qui ont contribué à la victoire éclair d’Israël lors de la guerre du Moyen-Orient de 1967.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a décrit dimanche Cohen comme une légende et « le plus grand agent de renseignement de l’histoire de l’État ».
Bien qu’Israël cherche depuis longtemps à rapatrier son corps pour l’inhumer en Israël, la restitution de ses archives, détenues depuis 60 ans par les services syriens, a été saluée par le Mossad comme « un accomplissement d’une portée morale exceptionnelle ».
Israël n’a pas révélé publiquement comment il avait obtenu ces archives, indiquant seulement que cela résultait « d’une opération secrète et complexe du Mossad, en coopération avec un service de renseignement étranger allié ».
Les bureaux de Netanyahu, les responsables syriens et la Maison Blanche n’ont pas répondu immédiatement aux sollicitations concernant le rôle de la Syrie dans la récupération des archives Cohen par Israël.
Dossier Cohen
Selon la source sécuritaire syrienne, après que les rebelles menés par Sharaa ont soudainement renversé le président Bachar al-Assad en décembre, mettant fin à 54 ans de règne familial, ils ont retrouvé le dossier Cohen dans un bâtiment de la sécurité d’État.
Sharaa et ses conseillers étrangers ont rapidement décidé d’utiliser ce matériel comme levier diplomatique, a ajouté la source.
La source a précisé que Sharaa avait compris que les archives Cohen revêtaient une importance capitale pour Israël et que leur restitution pouvait constituer un geste diplomatique significatif.
Mettre fin aux attaques israéliennes contre la Syrie et améliorer les relations avec les États-Unis et d’autres pays occidentaux sont essentiels pour Sharaa, qui cherche à redresser un pays dévasté par 14 ans de guerre civile.
Israël considère Sharaa et ses ex-insurgés, jadis affiliés à la branche syrienne d’al-Qaïda, comme des jihadistes irréductibles. L’armée israélienne a mené une incursion dans les zones frontalières l’année dernière et a bombardé régulièrement des cibles en soutien à la minorité druze de Syrie.
Ce mois-ci, l’agence Reuters a rapporté que les Émirats arabes unis avaient mis en place un canal de discussion officieux entre Israël et la Syrie, incluant des efforts pour instaurer un climat de confiance entre les deux parties.
Selon deux personnes proches du dossier, d’autres canaux indirects ont également été utilisés pour les discussions.
Au cours de ces pourparlers, la Syrie aurait accepté plusieurs mesures, dont la restitution des restes de Cohen ainsi que ceux de trois soldats israéliens tués lors de combats contre les forces syriennes au Liban dans les années 1980, selon une source informée. Le corps de l’un de ces soldats, Zvi Feldman, a déjà été rendu, a annoncé Israël la semaine dernière.
La restitution des archives Cohen s’inscrit dans le cadre de ces mesures de confiance et a été effectuée avec l’approbation directe de Sharaa, selon cette source.
La semaine dernière, Trump a réalisé une rencontre surprise avec Sharaa en Arabie saoudite, où il l’a encouragé à normaliser les relations avec Israël et a annoncé la levée des sanctions contre la Syrie.
Des responsables syriens ont déclaré vouloir la paix avec tous les États de la région, et Sharaa a confirmé ce mois-ci que Damas avait mené des discussions indirectes avec Israël via des pays avec lesquels elle entretient des relations, dans le but d’apaiser la situation.