Les avocats tunisiens ont rendez-vous avec l’Histoire

Un avocat tunisien , vient de se faire arrêter. Et pas n’importe lequel, le coordinateur du collectif de défense sur le procès du « complot » . Celui dont le dernier combat, à l’image de son premier combat, est le droit, rien que le droit, tout le droit. Il défendait le droit de la Tunisie, comme les militaires, valeurés s’il en est, défendent au prix de leurs sang et de nos martyrs, nos frontières.

Les avocats, une fois de plus, ont rendez-vous avec l’Histoire. La même Histoire dont un des contributeurs, le Zaim Habib Bourguiba, avocat, s’était opposé à ceux qui s’en prenaient à la souveraineté de la Tunisie. En voulant garder leurs ses frontières.

Les frontières hier, son droit aujourd’hui, la souveraineté d’un pays appartient et n’appartient qu’à son peuple.

J’ai été condamné à 25 ans de prison, pour avoir diner au Luxembourg, pays où je n’ai jamais été, avec Kamel Eltaief que je ne connais pas, Nejla Eltaief qui n’existe pas, et BHL que je n’ai jamais rencontré, pas même croisé sur un trottoir, pas même lu un de ses livres, si tant est que lire aurait pu être constitutif d’un échange. Soit.

Ma personne n’importe pas. Et si je devais servir à une seule chose, au delà des câlins à mes enfants que j’aime tant, au delà de mes lunettes qui servent à celle que j’aime tellement, si je ne devais servir qu’à une seule chose, ça serait d’étayer le fait que le droit est confisqué. Et que revenir pour comparaitre, se présenter pour être entendu, tellement sûr de son bon droit que je ne me suis pas dérobé, ne sert à rien. Assis sur le banc des accusés des heures durants, des jours durants, je n’ai été ni entendu, parce que même pas interrogé, ni écouté puisqu’on a refusé de me donner la parole, et la justice n’a même pas jugé nécessaire de nous exposer ce pour quoi elle nous demandait des comptes. Je, nous, n’avons existé que dans la sentence, pour nous empêcher d’exister. Et ne nous plaignions pas, nous les présents, car les détenus n’ont même pas eu le droit d’exister ne serait-ce que physiquement. Ou quand les corps et les esprits sont niés.

Ma chère Justice, moi qui t’ai prêté serment, je suis à ton chevet, nous sommes à ton secours. Car cette justice comme nos frontières, ce sont les remparts contre ceux qui veulent nous confisquer, à nous citoyens, notre pays. Les frontières protègent La Tunisie de ceux qui veulent l’atteindre de l’extérieur, notre droit protège notre Tunisie de ceux qui veulent l’atteindre de l’intérieur. Or le droit n’est plus appliqué, et ceux chargés de le défendre arrêtés.

Je ne suis pas belliqueux et je ne suis pas politicien, je ne me dresserai jamais contre personne. En revanche, et la Tunisie chevillée au coeur, je m’élèverai toujours, pour être mobilisée à ses cotés. et ma dernière larme sera pour elle, comme l’a été ma première fierté.

La justice désormais bâillonnée de justice et privée du droit, n’a plus d’autres choix que de hurler l’injustice.

Karim Guellaty