Lotfi Abdelli m’écœure…les policiers agresseurs de Sfax aussi

Je trouve plusieurs rappeurs, dont surtout l’ignare et l’illettré klaï bbj (peu importe que son surnom s’écrive ou pas ainsi, puisqu’il est -comme ses semblables- destiné à disparaître), méprisables et indignes de se produire sur une scène ou sur des plateaux, tant les paroles qu’ils profèrent, au nom de la liberté, en particulier d’expression, dépassent l’incorrection, la grossièreté et le langage de ruisseau. Évidemment, je ne parle pas d’art, car ils ignorent ce que cela est…

J’admets que je suis tout le contraire d’un fan du rap, mais je reconnais que ce que proposent d’autres, comme l’artiste (oui, c’en est un) Balti, émerge du lot. Ses textes sont à thèmes, osés mais épurés. Sa musique est un tant soit peu réfléchie, élaborée et variée. En plus, sa tenue et ses propos quand il donne des déclarations, montrent que c’est un homme poli et propre. C’est dire que même si je n’aime pas le rap, j’essaie de rendre à César son dû.

Idem, mais à un degré moindre, j’ai le même sentiment envers nombre de nouveaux pseudo-humoristes et d’animateurs qui, sans atteindre le dernier sous-sol de l’absence de politesse, de goût, de finesse et de correction, contribuant à épaissir la masse des débiles, des ignorants et des impolis, n’en sont pas loin.

Mais celui qui me révolte et m’écoeure beaucoup plus que ceux-ci et ceux-là, c’est bien ce Lotfi Abdelli, à qui il n’y a aucun rabaissant qualificatif égal à ce qu’il est (attitude, animation, propos…) et à ce qu’il présente sur les planches, qui n’a rien à voir avec le théâtre et le droit à la liberté qui lui est inhérente. Il me révolte et je lui en veux aussi, parce qu’il a gâché, non seulement le potentiel talentueux et inné que je lui reconnais, mais les chances qu’il a eues pour être quelqu’un d’autre et pour dépasser son illettrisme et sa condition d’enfant et d’adolescent mal encadré, dans un quartier populaire. En effet, il a fait partie d’un groupe de danse (je crois que c’était celui de Syhem Belkhodja dont on connaît la rigueur de l’encadrement artistique et surtout comportemental) avant de s’essayer à la comédie, puis il a la chance d,’être choisi par Nouri Bouzid où il décroche le Tanit du meilleur comédien aux JCC. Son talent aidant, il devient sollicite dans plusieurs productions. Seulement au lieu que son entrée dans le cercle des comédiens « privilégiés » adoucisse ses moeurs et lui fasse prendre conscience de la nécessité de modérer ses réflexes de « voyou », de pallier ses tares intellectuelles d’un enfant qui n’a connu l’école que quelques années, il prend sa popularité pour tremplin à un plongeon qui le mène, toujours plus loin, dans le mauvais goût, l’impolitesse, l’arrogance, le langage, les allusion et les gestes de bas-fonds…de ruisseau. Narguer la « supposée » incontinence de Caïd Essebsi, évoquer les sous-vêtements de Abir Moussi ou adresser le doigt du milieu au corps policier n’en sont que des illustrations parmi tant d’autres. Le pire c’est que dans sa citrouille de tête, il croit faire de l’engagement politique

Et si Lotfi Abdelli draine des masses, bêtement hilares, insensibles à l’indécence et à la bassesse, appréciant l’anti-art et le contre-humour, je dirais pour faire court et ne pas m’étendre dans une analyse sociologique, l’anaphabétisme, le mauvais goût, le recul du sens de la réflexion et du discernement ont gagné beaucoup de terrain, y compris parmi ceux qui ont couronné un niveau d’études par un diplôme. Et Abdelli se trouve en droit de dire et de revendiquer « الشعب يريد » (le peuple veut). Cet « argument » est égal à celui brandi par les meneurs de la campagne favorable au référendum, qui nous ont gavés d’éloquence, de bon sens et de clarté.

Seulement, quelles que soient les dérives de ce non-artiste, les agents de police qui ont profané la scène du théâtre de Sfax, leur statut et leur mission, n’avaient pas le droit d’agir en « justiciers », « dresseurs de torts » au dessus des lois. Ils ont fait pire que lui, car c’est à l’Etat, à ses institutions et à leur perception qu’ils ont porté un coup fatal. Ils se sont comportés en hors-la-loi, sûrs de leur et de l’impunité… Cela est pire que toutes les souillures de Abdelli. En plus, ces quelques égarés en ont fait, aux yeux de nombreux simplistes, un martyr de la liberté…un héros. Wa3dalla 3ala Tounès

Slah Grichi