Le président américain sortant Donald Trump a accordé une grâce complète à une quinzaine de personnes et commué partiellement ou complètement les peines de cinq autres, a annoncé la Maison Blanche mardi 22 décembre. Ces pardons bénéficieront notamment à deux personnalités mises en cause dans l’enquête sur l’ingérence russe lors de l’élection de 2016.
Une grâce totale a ainsi été accordée à George Papadopoulos, un ancien conseiller diplomatique du président américain pendant sa campagne de 2016. Il avait reconnu avoir menti au FBI à propos de ses contacts avec un intermédiaire qui avait promis de le mettre en relation avec des responsables russes et avait purgé 12 jours de prison. « La grâce d’aujourd’hui corrige le mal infligé à beaucoup de gens par Mueller [procureur qui a supervisé l’enquête] », a déclaré la Maison Blanche.
Les grâces critiquées par les démocrates
Donald Trump a également gracié quatre anciens criminels , employés de la société de sécurité privée Blackwater, impliqués dans les meurtres d’Irakiens en 2007. Ils avaient été reconnus coupables d’avoir pris part à une fusillade à Bagdad qui avait provoqué un scandale international, mettant notamment en lumière le recours à des sociétés privées par l’armée américaine. Quatorze civils irakiens avaient été froidement tués et 17 autres blessés.
Ils avaient été reconnus coupables d’avoir ouvert le feu à la mitrailleuse et jeté des grenades sur un carrefour très fréquenté de Bagdad, alors qu’ils circulaient en véhicules blindés, un carnage qui avait suscité une indignation mondiale.
L’un des hommes grâciés, Nicholas Slatten ( photo ci-dessus ) , a été condamné à une peine de prison à vie. les trois autres à des peines de 12 à 15 ans .La Maison Blanche a déclaré que les quatre Américains, tous anciens militaires, avaient « un long passé de service à la nation ».
« Choquantes », « ignobles », « déshonorantes »
« Choquantes » , « ignobles », « déshonorantes » : les grâces accordées par Donald Trump à d’ex-mercenaires condamnés pour les meurtres d’Irakiens en 2007 et à des personnalités mises en cause dans l’enquête russe ont provoqué l’indignation, à Washington comme à Bagdad.
À Bagdad, l’officier irakien qui a mené les enquêtes sur la fusillade a exprimé son indignation. « Je m’en souviens comme si c’était hier », a déclaré à l’AFP Fares Saadi. « Je savais que nous ne verrions pas la justice ».
« Je sais que rien de ce qu’il fait ne me surprend plus, mais quel abus de pouvoir choquant, partisan et répugnant ! », a tweeté le sénateur démocrate Chris Van Hollen.
« Tout ceci me donne envie de vomir », a jugé l’ancienne sénatrice démocrate Claire McCaskill, qui siégeait à la commission des Forces armées de la Chambre haute. « Cette grâce déshonore notre armée de façon indicible ».
Pour Mark Hertling, un ancien général ayant combattu en Irak, « la grâce accordée aux employés de Blackwater est l’acte de Donald Trump le plus scandaleux et le plus ignoble ». « C’était un crime de guerre lâche qui a causé la mort de 17 civils. Honte à vous, M. le président ! », a-t-il tweeté.
La société Blackwater, qui a depuis disparu, avait été fondée par l’un des plus farouches partisans de Donald Trump, Eric Prince, qui est aussi le frère de la ministre de l’Éducation Betsy DeVos.
Donald Trump envisagerait également, selon la presse américaine, d’accorder une grâce préventive à ses enfants, à son gendre Jared Kushner et à son avocat personnel Rudy Giuliani, avant de quitter la Maison-Blanche en janvier.
Le milliardaire aurait aussi évoqué l’éventualité de se gracier lui-même de crimes pour lesquels il pourrait être poursuivi en relation avec son mandat. En 2018, il avait affirmé avoir « le droit absolu » de prendre cette mesure, qui serait un précédent.