Slah Eddine Essid sera toujours parmi nous.

Je regrette la disparition de Slah Eddine Essid. C’était, sans l’ombre d’un doute, le réalisateur le plus doué qu’ait connu la télévision tunisienne et l’œuvre qu’il nous a léguée témoigne en sa faveur, particulièrement ses deux chefs-d’œuvre (El khottab ‘al bab et Choufli hal), lesquels font aujourd’hui partie intégrante du patrimoine culturel tunisien.

Slah Essid est un peu le Gérard Oury de la télévision tunisienne. En effet, ses feuilletons sont ceux qui ont obtenu le plus franc succès aussi bien auprès du public qu’auprès des critiques. Plusieurs générations de Tunisiens ont grandi en regardant ses feuilletons qui, comme les films d’Oury avec de Funès, passent chaque année et de nombreuses fois à la télé sans que personne ne s’en lasse.

Je ne connaissais pas ce monsieur, mais, ce qui est sûr, c’est que c’était un homme discret. Il n’était pas du genre à se pavaner de plateau en plateau avec, en sautoir, son statut de d’ « aîné donneur de leçons ». Slah Essid tranchait radicalement avec la ploucaille inculte qui, aujourd’hui, fait la pluie et le beau temps dans le paysage audiovisuel tunisien.

Il tranchait aussi avec les « fils de » prétentieux qui se prennent déjà pour des Stanley Kubrick, alors qu’ils produisent de la merde audiovisuelle en s’inspirant du cinéma américain commercial, et avec les putes de luxe dotées d’un QI proche de la débilité mentale et qui ont investi les chaînes de télévision privées pour conjuguer leur envie de ne rien foutre avec celui de devenir riches et célèbres.

Le seul reproche que je serais tenté d’adresser à Slah Eddine Essid et aux gens de sa génération, c’est qu’ils n’ont pas transmis le flambeau aux générations d’aujourd’hui. La dictature y est certainement pour quelque chose, mais il faut avouer que la contemplation de leur nombril participait pour beaucoup au sentiment de réussite.

Les jeunes de cette génération ont eu la chance d’être formés dans les écoles franco-bourguibiennes avant de s’envoler, sans visa, pour la France et de fréquenter les beaux esprits du Quartier Latin et de Saint-Germain-des-Prés. De retour au bercail, ils ont continué leur petit bonhomme de chemin, certains d’entre eux prospéraient doucement, devenaient même riches parfois, mais sans trop songer aux générations futures. Bref, ce n’est pas le moment de trop nous étaler sur ce sujet.

Slah Eddine Essid est parti pour un long voyage, sa famille et ses amis sont séparés de lui, mais nous savons que, grâce à l’œuvre qu’il nous a laissée, il sera toujours parmi nous.

Qu’il repose en paix.

Pierrot LeFou