Les pays de l’Union européenne sont finalement parvenus, jeudi, à un accord sur une réponse économique commune face au coronavirus. Le ministre français de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a salué un « excellent accord », qui comprend un plan de soutien d’environ 500 milliards d’euros. Le texte ne mentionne toutefois pas la création de « corona bonds ».
Après une première réunion infructueuse mardi, puis des échanges tendus, les ministres européens des Finances sont finalement parvenus à s’entendre jeudi sur une réponse économique commune face au coronavirus, trouvant un terrain d’entente avec les Pays-Bas, longtemps inflexibles.
La réunion s’est achevée sous les applaudissements des ministres, a annoncé sur Twitter le porte-parole du président de l’Eurogroupe aux alentours de 22 h, heure de Bruxelles.
Le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, a quant à lui salué un excellent accord, incluant 500 milliards d’euros disponibles immédiatement et un fonds de relance à venir.
Ce consensus constitue un soulagement pour les Européens qui parviennent à afficher une unité face aux conséquences économiques désastreuses du virus, après des semaines d’atermoiements mettant en évidence une fracture béante entre les pays du Nord et ceux du Sud.
Face à la pandémie, la réponse européenne doit s’orienter sur trois axes principaux : jusqu’à 240 milliards d’euros de prêts du fonds de secours de la zone euro, un fonds de garantie de 200 milliards d’euros pour les entreprises et jusqu’à 100 milliards pour soutenir le chômage partiel.
La question des coronabonds toujours en suspens
La brûlante question des coronabonds, destinés à soutenir l’économie à plus long terme après la crise, considérée comme moins urgente, n’a pas été tranchée jeudi.
Les chefs d’État et de gouvernement, qui n’étaient eux-mêmes pas parvenus à s’entendre lors d’un sommet le 26 mars, devront encore valider ces propositions.
Une réponse unitaire était d’autant plus indispensable que l’économie européenne se dirige en 2020 vers une profonde récession, le Fonds monétaire international estimant même que le coronavirus pourrait engendrer au niveau mondial les pires conséquences économiques depuis la Grande Dépression de 1929.
Les contacts bilatéraux s’étaient multipliés depuis deux jours, avec la volonté d’aboutir à un compromis avant la réunion par visioconférence, initialement programmée à 17 h, heure locale, mais qui n’a débuté qu’à 21 h 30.
Mercredi matin, après 16 heures d’échanges stériles, La Haye avait été unanimement critiquée pour son inflexibilité, un blocage qualifié de contre-productif et incompréhensible par la présidence française.
Le blocage des Pays-Bas jugé irresponsable
Les États membres reprochaient aux Pays-Bas – soutenus, selon une source européenne, par l’Autriche, la Suède et le Danemark – de bloquer l’activation du Mécanisme européen de stabilité (MES) en subordonnant strictement les prêts que pourrait octroyer ce fonds de secours de la zone euro à des réformes économiques.
Une telle conditionnalité, qui renverrait à l’époque où la Grèce a été contrainte de mettre en œuvre des réformes parfois douloureuses en échange d’argent frais, aurait été vécue comme une humiliation par Rome et Madrid, les deux pays européens pour l’instant les plus touchés par l’épidémie.
Créé en 2012 lors de la crise de la dette et financé par les États membres, le MES pourrait prêter aux États jusqu’à 2 % de leur PIB, soit jusqu’à 240 milliards d’euros pour l’ensemble de la zone euro.
L’ancien président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, s’est invité jeudi dans le débat, jugeant irresponsable l’attitude des Pays-Bas, dans le quotidien Libération.
Berlin et La Haye contre Paris et Madrid
Les pays les plus touchés par le virus, en particulier l’Italie, réclament la création d’un fonds de relance qui puisse être financé par de la dette commune, sous la forme d’euro-obligations parfois appelées coronabonds ou eurobonds.
Parmi ces pays figurent aussi l’Espagne et la France, ainsi que la Grèce, Malte, le Luxembourg et l’Irlande, selon des sources concordantes.
Pourtant, la mutualisation des dettes constitue une ligne rouge pour Berlin et La Haye, qui refusent de s’inscrire dans une démarche commune avec les États très endettés du Sud, jugés laxistes dans leur gestion.
Le texte final évoque un fonds de relance dont les aspects juridiques et pratiques, notamment le financement, devront encore être définis.
«Juste et raisonnable»
Les Etats membres reprochaient à La Haye de bloquer l’activation du MES, créé en 2012 lors de la crise de la dette et financé par les Etats membres, en conditionnant strictement les prêts qu’il pourrait octroyer à des réformes économiques.
Une telle «conditionnalité», qui aurait renvoyé à l’époque où la Grèce a été contrainte de mettre en œuvre des réformes parfois douloureuses en échange d’argent frais, aurait été vécue comme une humiliation par Rome et Madrid, les deux pays européens les plus touchés par l’épidémie.
Selon l’accord, les prêts, jusqu’à 2% du PIB de l’Etat concerné, soit 240 milliards d’euros pour l’ensemble de la zone euro, pourront être utilisés sans condition pour les dépenses de santé et de prévention liées au coronavirus.
Un compromis jugé «juste et raisonnable» par le ministre néerlandais Wopke Hoekstra, qui souligne qu’«un soutien économique» du MES hors dépenses de santé restera assorti de «certaines conditions».
«Les eurobonds sont sur la table, les conditions du MES ont été retirées de la table. Nous remettons au Conseil européen une proposition ambitieuse», s’est de son côté félicité le ministre italien de l’Economie Roberto Gualtieri.
Les deux autres axes de réponse des Européens face au virus étaient plus consensuels : un fonds de garantie de la Banque européenne d’investissement (BEI) permettant de mobiliser jusqu’à 200 milliards d’euros pour les entreprises et une garantie maximale de 100 milliards d’euros de la Commission européenne pour soutenir les plans nationaux de chômage partiel.
Avec agences