De retour de l’étranger après une courte mission, certaines données relatives à l’état de santé du dinar m’ont interpellé. Lors de mon départ de la Banque Centrale en 2011, l’Euro était à DT 1,92 et le dollar US à DT 1.44. Aujourd’hui, le dollar US est à 2.97 soit le double de sa valeur de 2010 et l’Euro est à 3.35 .Les allocations touristiques qui ont été portées durant la période que j’ai passée dans cette prestigieuse institution entre 2004 et 2010, de DT 1000 à DT 6000, ne représentent plus qu’environ 1700 euros contre 3100 euros à la fin de 2010 et 2070 dollars US contre 4170 dollars.
Les déficits extérieurs ne désarment pourtant pas : le déficit du commerce extérieur sera probablement aux alentours de DT 2O milliards en 2018 et depuis le mois d’août, ce déficit est à DT 2 milliards par mois, soit un rythme annuel de DT 24 milliards contre DT 6 milliards seulement moins de dix ans auparavant (données de 2009). Le déficit des paiements courants sera quant à lui de plus de 10% du PIB en 2018 et ce pour la deuxième année consécutive et à une moyenne de plus de 8.5% durant la période 2011-2018. Du jamais vu dans ce pays depuis son indépendance avec ce que cela signifie en termes d’endettement extérieur supplémentaire.
Je vous laisse le soin d’interpréter ces chiffres et d’en tirer les leçons sur l’efficacité des politiques menées durant ces dernières années : des erreurs de diagnostic, des politiques et des stratégies inefficaces et inadaptées, etc. Notre livre « Le miroir et l’horizon- rêver la Tunisie » propose une stratégie de sortie de crise en deux temps : des mesures à court terme en vue d’arrêter l’hémorragie, assainir la situation financière du pays et infléchir les tendances de baisse, notamment celle du dinar et une stratégie à moyen terme faite essentiellement de réformes destinées à remettre l’économie du pays de nouveau sur le droit chemin.
Taoufik Baccar , ancien ministre des finances , ancien gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie et actuel président du CIPED