« C’est en France les potes , la France de l’opulence et de la démocratie qui manifeste depuis seulement 1 mois . Quand on sait qu’en Tunisie, un pays à genoux, on ne fait que ça 7 ans et de la façon la plus sauvage, il y a lieu de se poser bien des questions sur ces droits de manifester. » Essoussi Kamel
Le ministère de l’Intérieur aurait en effet émis un avis favorable à l’instauration d’interdictions administratives de manifester
Selon plusieurs sources, le ministère français de l’Intérieur aurait l’intention d’introduire dans le droit ordinaire une disposition prévue par l’état d’urgence permettant d’interdire à certains individus de manifester.
C’est une mesure d’exception que permettait la loi relative à l’état d’urgence : elle pourrait à l’avenir être intégrée au droit commun, selon des informations du Figaro et du Monde. Le ministère de l’Intérieur aurait en effet émis un avis favorable à l’instauration d’interdictions administratives de manifester.
Si Le Monde évoque des «pistes de réflexion» suivies par la place Beauvau, Le Figaro rapporte, selon des sources au sein du ministère, que le projet serait déjà bien avancé. Il viserait prioritairement des individus faisant déjà l’objet d’un signalement pour des faits de violence. Cette mesure, qui contraint les fauteurs de trouble à émarger dans un commissariat à l’heure du rassemblement auquel ils n’ont pas le droit de participer, est déjà régulièrement utilisée depuis mai 2016, principalement pour des individus issus de la mouvance antifasciste.
Cependant, un tel dispositif n’est permis que par l’article 5 de la loi relative à l’état d’urgence, qui autorise le préfet à «interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par arrêté» ainsi qu’à «interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics». Son introduction dans le droit commun serait donc une nouveauté de taille. Elle conforterait sans doute dans leurs critiques les voix qui se font entendre depuis quelques semaines pour dénoncer une «dérive» lors de l’étude par les parlementaires de la loi antiterroriste, qui a suscité jusqu’aux inquiétudes de l’ONU.
Flirt avec l’inconstitutionnalité
Cela est rendu possible par l’article 5 de la loi relative à l’état d’urgence, donnant la possibilité aux préfets « d’interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par arrêté », mais aussi « d’interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics ».
En revanche, il n’existe pas d’équivalent dans le droit commun actuel. Auprès du Figaro, un officier de la Direction générale de la Gendarmerie nationale souligne ainsi qu’une éventuelle transposition dans la législation risquerait d’entrer en contradiction « aux principes constitutionnels de la liberté d’aller et venir ». D’ailleurs, la mesure avait été un temps censurée par le Conseil constitutionnel avant d’être réintroduite avec les précisions réclamées par les Sages. Elle ne sera plus en vigueur au 1er novembre, date à laquelle prend fin la dernière prorogation du régime d’exception, laissant place à la future loi antiterroriste en cours d’examen à l’Assemblée nationale.
La loi antiterroriste risque-t-elle de restreindre
Le projet de loi antiterroriste ne reprend pas cette « interdiction de séjour » très restrictive. Le texte envisagé octroie toutefois le pouvoir aux préfets d’instituer, en cas de menace terroriste, « un périmètre de protection au sein duquel l’accès et la circulation des personnes sont réglementés ». Les individus qui « refusent de se soumettre (…) aux palpations de sécurité, à l’inspection visuelle ou à la fouille de leurs bagages » pourraient alors se voir refuser l’accès au lieu concerné. S’il n’est pas question ici de cibler des personnes en particulier, les opposants au texte s’inquiètent toutefois de termes jugés trop flous.
« Amnesty International craint que la mesure ne soit mise en œuvre d’une façon disproportionnée notamment car les agents de sécurité ou les agents responsables de la mise en œuvre des lois ne semblent pas devoir justifier les palpations de sécurité ou les fouilles de bagages. Sous l’état d’urgence, les autorités ont utilisé cette mesure pour limiter le trajet et l’accès à des manifestations. […] Amnesty International craint que les autorités aient recours à cette mesure pour restreindre le droit de réunion pacifique d’une façon disproportionnée », s’alarme l’ONG dans une analyse détaillée.
Avec médias français