Tunisie : Hommage à l’ouvrier inconnu

Le 8 mai 2019, un ouvrier municipal est mort sur le trottoir d’une des rue de Tunis qu’il nettoyait, foudroyé par une crise cardiaque. Il a choisi la dignité et refusé la mendicité qui lui aurait procuré plus de revenu que son maigre salaire. A son agonie, il tenait encore dans ces mains, avant de rendre l’âme, le balai et la pelle. La chaleur, la soif, le jeûne et l’effort l’ont terrassé. Bouche ouverte, tête nue, il était étendu sur le trottoir. Comme l’avait écrit Arthur Rimbaud dans son poème « Le dormeur du val » :

« … il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme »

Cet ouvrier n’a pas refusé de travailler malgré son état chétif et son maigre salaire de 450 dinars tout au plus. Il n’a pas voulu laisser la ville rongée par les saletés de ceux qui font grève pour un rien. Il a besoin de ces quelques petits dinars pour subvenir dignement aux maigres besoins de sa famille qui doit manquer de tout. Ceux qui ont tout, font grève même si le pays devait se ruiner et mendier auprès du FMI et que le Chef du Gouvernement, Y.Chahed finisse par vendre le pays au rabais à l’Union Européenne. Les professeurs universitaires qui menacent à ce jour de saboter les devoirs des étudiants doivent avoir honte devant cette mort tragique de ce pauvre ouvrier qui n’a rien demandé et qui ne les a pas menacés de les laisser enfouis sous les tonnes de leurs ordures.

Cet ouvrier subit la retenue à la source au titre de l’impôt sur le revenu. Avocats, médecins, bureaux d’études, commerçants, capitalistes, contrebandiers, spéculateurs de toutes sortes, corrompus à tous les niveaux de l’administration, ne payent pas leurs impôts ou s’ingénient à l’éluder et payer le moins possible. Cet ouvrier paye l’éducation de leurs enfants et les routes sur lesquelles circulent leurs grosses cylindrées et les barrages qui fournissent l’eau à leurs piscines et à leurs jardins. Ils n’ont pas honte de piquer dans l’assiette des pauvres. Ce sont eux qui ont tué ce pauvre ouvrier. Ils l’ont privé des soins nécessaires et d’hygiène alimentaire. A la rupture du jeûne, sa femme et ses enfants accablés de chagrin, ne pourront pas toucher à la maigre pitance préparée dans un coin du gourbi multi fonctionnel, dans une marmite toute en suie. Les bons musulmans auront en ce moi de Ramadan, le cerveau logé dans leur panse, à s’empiffrer de mets divers, jusqu’à l’étouffement , le vomissement et l’assoupissement.

La famille de cet ouvrier ne serait pas aidée. Sa mort n’a pas fait le buz sur les chaînes TV. Sa mort n’est pas politiquement et médiatiquement exploitable. Les donateurs ne se bousculeront pas devant la porte de son gourbi, personnes ne les verra ou n’entendra parler de leur geste. Pour eux, même la mort doit être un filon de notoriété et de gains.

Les pauvres sont écrasés. Même les zigotos du Front populaire s’en sont détournés. En effet, L’UGTT, le Front Populaire et les frères musulmans en underground sont là quand il s’agit de casser, de détruire, d’arrêter le travail, de se solidariser avec les bras cassés, les saboteurs et les violeurs. Cet ouvrier travaillait consciencieusement, il est le mauvais exemple pour eux. La gauche Tunisienne du Front populaire ne défend plus les ouvriers, mais la petite bourgeoisie à col blanc, cette classe infantile et parasitaire comme l’aiment le dire Karl Marx et Vladimir Lénine et dont les aspirations sont focalisées sur plus de luxe bourgeois, au détriment du trésor public et des secteurs productifs. La satire de Georges Orwell « La ferme des animaux », semble avoir été écrite pour cette gauche, gauche.

En cette période électorale, les ministres ne pensent qu’à leur survie et à leur reconduction. Les députés vendraient leurs mères pour s’assurer du fauteuil parlementaire.

Les partis sont lancés dans une course folle sur l’hippodrome infernal de l’opportunisme, piétinant toutes les valeurs sur leur passage pour arriver dans le tiercé ou le quarté gagnant. Il y a encore du butin au final.

Pour tous ces parasites enturbannés ou en cols blancs, un soldat tué sur le front se sacrifiant pour le pays, ou un ouvrier mort se sacrifiant pour la propreté d’un trottoir d’une ville ne méritent pas le recueillement, les honneurs et la compassion dans ce pays de toutes les bassesses, les souillures, les corruptions, les compromissions et les trahisons.

Abû Zakaria Yahya Ibn Abi Hafs est à ressusciter pour écraser les frondes berbères et hilaliennes qui ont resurgi depuis le 14 janvier 2011, et éliminer les descendants actuels des frères Ben Ghania qui ont mis le pays à sac au début du XIIIème siècle. Les braves seront alors vengés et honorés.

Mounir Chebil