Les Etats-Unis demandent à l’Arabie saoudite de libérer le blogueur Raif Badawi

Le vice-président des États-Unis Mike Pence a demandé à l’Arabie saoudite de libérer le blogueur Raif Badawi, emprisonné pour avoir critiqué une lecture wahabite rétrograde de l’islam.

Cet appel s’est fait dans le cadre d’une conférence sur la liberté religieuse qui était organisée par le département d’État américain.

En Arabie saoudite, « le blogueur Raif Badawi est toujours en prison sous l’accusation d’avoir critiqué l’islam sur des médias électroniques », a souligné Mike Pence.

Dans son allocution, Mike Pence a également appelé à la libération de dissidents religieux actuellement détenus en Érythrée, en Mauritanie, au Pakistan et en Arabie saoudite.

« En dépit de pressions inimaginables, ces quatre hommes ont défendu la liberté religieuse avec force, et le peuple américain les soutient. Les États-Unis appellent les gouvernements de l’Érythrée, de la Mauritanie, du Pakistan et de l’Arabie saoudite à respecter la liberté de conscience et à laisser partir ces hommes. »  : Mike Pence, vice-président des États-Unis

C’est la première fois que le gouvernement américain exhorte publiquement son allié saoudien à respecter la liberté religieuse et surtout à mettre un terme à l’emprisonnement de Raif Badawi.

L’administration du président Donald Trump est sous pression des démocrates du Congrès et de certains républicains pour avoir répondu de façon trop conciliante, selon eux, à l’assassinat du journaliste Jamal Kashoggi, étranglé et démembré dans les locaux du consulat saoudien à Istanbul.

Donald Trump loue au contraire ses excellentes relations avec le prince héritier Mohammed Ben Salmane, homme fort du régime.

Il estime aussi qu’il n’est pas question de se brouiller avec un régime qui est un des tout premiers clients de l’industrie d’armement américaine et qui partage son hostilité à l’égard de l’Iran.

Signe de ces résistances à sa politique vis-à-vis de Riyad, le Congrès a voté mercredi 17 juillet  une résolution bloquant une vente d’armes à l’Arabie saoudite, qu’il ne pourra surmonter qu’en y apposant son veto.

« Raif n’est pas un criminel »

La démarche a été saluée par l’épouse de Raif Badawi, Ensaf Haidar, qui avait demandé il y a plusieurs mois à rencontrer le président américain Donald Trump au sujet de la libération de son mari.

Raif n’est pas un criminel, il se bat pour le droit des femmes, a notamment souligné Ensaf Haidar en entrevue à Radio-Canada. Elle espère d’ailleurs toujours être reçue à la Maison-Blanche.

La nouvelle a également surpris l’organisme Amnistie internationale, qui épaule les démarches d’Ensaf Haidar depuis les sept dernières années.

C’est venu vraiment comme une surprise pour nous, mentionne la porte-parole de l’organisme en Estrie, Mireille Elchacar. On est évidemment contents d’avoir cet appui important et massif. C’est sûr que les États-Unis sont un gros joueur, et on pense depuis le début que la diplomatie est la voie à adopter pour essayer de trouver une solution à ce problème. On espère que ça va faire partie d’une stratégie plus large.

Par courriel, une porte-parole de la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a déclaré : Nous restons extrêmement préoccupés par le cas de Raif Badawi. Nous l’avons soulevé au plus haut niveau et nous avons appelé à plusieurs reprises à ce que la clémence soit accordée. Elle a en outre ajouté que le premier ministre Justin Trudeau s’est entretenu du cas de M. Badawi avec le roi d’Arabie saoudite, en janvier 2019.

Le blogueur est détenu dans les geôles saoudiennes depuis l’été 2012, après avoir été condamné à 10 ans de détention et à 1000 coups de fouet pour avoir critiqué l’islam sur le site Internet Libérez les libéraux saoudiens, de même que pour ses chroniques dans un journal du pays.

Au début des procédures, il faisait face à une accusation d’apostasie, un crime en Arabie saoudite qui peut mener à la peine de mort.

Sa femme et ses enfants, qui ont trouvé refuge au Canada, mènent une campagne active depuis plusieurs années pour qu’il soit libéré.

Un cas médiatisé

Le cas de Raif Badawi avait particulièrement attiré l’attention en janvier 2015 après qu’on lui eut infligé les 50 premiers coups de fouet prévus dans sa peine.

Des photos de son dos meurtri par les coups avaient ému l’opinion publique.

Le gouvernement canadien était d’ailleurs intervenu auprès des autorités saoudiennes pour dénoncer ce traitement.

Les séances de flagellation subséquentes ont été suspendues officiellement en raison de son état de santé.