Le Cèdre et l’Olivier

On se demandait, durant la fameuse guerre du Liban, comment les gens pouvaient continuer à y mener une vie trépidante, normale et même festive.
Avec une conjoncture ou règnent la misère et les menaces de terrorisme, les tunisiens nous donnent le même exemple et mènent le même train de vie ou presque : cafés bondés jusqu’à l’aube , circulation infernale, embouteillages monstres, Caddies remplis à ras-bord dans les grandes surfaces, festivals et mariages d’été dans chaque quartier, bousculades et vociférations dans les souks et les artères commerciales, profusion de produits à l’origine douteuse, prospérité du commerce parallèle, montagnes de détritus témoignant d’une consommation effrénée…etc .
La seule différence avec le Liban c’est qu’au plus fort de sa crise, la livre libanaise n’avait jamais flanché alors que le dinar tunisiens n’a jamais cessé de perdre du terrain, l’économie libanaise n’avait jamais été aussi florissante alors que celle de Tunisie n’a jamais été aussi précaire, fragile et chancelante.
À mon avis, la grande différence avec nous c’est que le Liban, malgré ses imperfections, a compris, avant tout le monde arabe, les règles démocratiques du vivre ensemble. La coexistence religieuse n’y est pas un slogan et un vain mot et ses expatriés affichent un haut degré de patriotisme.
Pourtant, ni son contexte géographique, ni son environnement politique et militaire, ni sa diversité humaine et religieuse, ni ses ressources naturelles limitées ne sont faits pour lui faciliter les choses.
Alors, assez de fanfaronnades !
Regardons-nous en face et corrigeons nos propres tares.
Avant de nous comparer au Portugal, à Singapour ou à la Suisse, comparons-nous d’abord au petit Liban.
Fructifions le mieux possible nos oliviers et ne rêvons pas trop de planter des cèdres.

Wahid Ibrahim