La Grande Bretagne suspend tout nouveau contrat de vente d’armes à l’Arabie saoudite

Le gouvernement britannique va cesser d’accorder de nouvelles licences d’armes à l’Arabie Saoudite, après un jugement d’une cour d’appel de Londres l’exhortant à revoir ses pratiques en matière de ventes au royaume wahhabite. Il a toutefois contesté cet avis.

Le gouvernement britannique a annoncé jeudi 20 juin la suspension de l’attribution à l’Arabie saoudite de nouveaux contrats de ventes d’armes pouvant être utilisées au Yémen, après une décision de la cour d’appel de Londres l’appelant à «reconsidérer» ses pratiques en la matière.

«Nous ne sommes pas d’accord avec le jugement et demanderons l’autorisation d’interjeter appel», a déclaré le ministre du Commerce International, Liam Fox, devant le Parlement britannique. «Dans l’intervalle, nous n’accorderons pas de nouvelles licences [de ventes d’armes] à l’Arabie saoudite et à ses partenaires de la coalition [menée par Riyad] qui pourraient être utilisées dans le conflit au Yémen», a-t-il ajouté.

La cour d’appel de Londres a estimé le 20 juin que la vente d’armes à l’Arabie saoudite par le Royaume-Uni dans le contexte du conflit au Yémen avait été entachée d’une «erreur de droit sur un point important». «[L’exécutif britannique] n’a pas évalué si la coalition dirigée par les Saoudiens avait commis des violations du droit international humanitaire par le passé, pendant le conflit au Yémen, et n’a fait aucune tentative pour le faire», a détaillé Terence Etherton, président de la division civile de la Cour d’appel, en appelant le gouvernement à revoir ses pratiques. «Le gouvernement doit reconsidérer la question», a-t-il insisté.

Le magistrat a toutefois indiqué que le jugement ne signifiait «pas que les licences d’exportation d’armes vers l’Arabie saoudite» devaient être «immédiatement suspendues».

La justice britannique saisie par une ONG

La justice britannique avait été saisie en 2015 par une organisation militant contre le commerce des armes, Campaign Against Arms Trade (CAAT), tentant d’obtenir la suspension des ventes britanniques de bombes et d’avions de chasse à l’Arabie saoudite. Cette dernière intervient militairement au Yémen voisin depuis 2015, à la tête d’une coalition régionale en soutien aux forces pro-gouvernementales opposées aux rebelles Houthis, soutenus par l’Iran.

Selon l’ONG, le gouvernement britannique s’est rendu coupable de «violations graves et répétées» du droit humanitaire international en fournissant des armes à cette coalition.

L’organisation, qui avait saisi la cour d’appel après avoir été déboutée en juillet 2017 par la Haute Cour de Londres, a «salué» le dernier jugement. «Cet arrêt historique signifie que le gouvernement doit maintenant cesser de délivrer de nouvelles licences d’exportation d’armes, suspendre les licences existantes et revoir toutes les décisions d’exporter des armes vers l’Arabie saoudite», a-t-elle déclaré dans un communiqué.

La CAAT s’est aussi émue de la réaction de l’exécutif. «Le gouvernement a déjà dit qu’il n’était pas d’accord avec le jugement de ce matin. Pas vraiment une surprise… il s’est battu à chaque étape et fera tout ce qu’il peut pour que les armes continuent à déferler sur l’Arabie saoudite», a-t-il commenté sur Twitter.

CAAT@CAATuk

But what next? The government has already said it disagrees with this morning’s judgment and will seek to appeal. Not really a surprise… it has fought this every step of the way and will do all it can to keep the weapons flowing to Saudi Arabia..

But what next? The government has already said it disagrees with this morning’s judgment and will seek to appeal. Not really a surprise… it has fought this every step of the way and will do all it can to keep the weapons flowing to Saudi Arabia…

Le Royaume-Uni aurait autorisé la vente d’au moins 4,7 milliards de livres d’armes à l’Arabie saoudite depuis le début de la guerre civile en mars 2015, la majeure partie des ventes enregistrées ayant eu lieu avant 2018.

Le Sénat américain bloque une vente d’armes à l’Arabie

Le Sénat américain a bloqué ce jeudi une vente d’armes à l’Arabie saoudite et à d’autres pays arabes autorisées par Donald Trump, un signe de défiance à la politique présidentielle favorable à Ryad malgré la guerre au Yémen et l’assassinat d’un journaliste saoudien.

Plusieurs élus de la majorité républicaine ont voté avec les démocrates pour s’opposer à cette vente que l’administration Trump avait autorisée en invoquant une situation d’urgence provoquée par l’Iran, pour contourner le Congrès.

Le sénateur Robert Menendez a fait savoir mercredi que le Sénat américain va procéder jeudi à un vote en vue de bloquer une vente d’armes par l’administration Trump à trois pays arabes sans que celle-ci fasse l’objet d’un examen préalable du Congrès.

Ce dernier, démocrate du New Jersey, et Mitch McConnell, le chef de la majorité sénatoriale, sont parvenus à un consensus sur la tenue de votes jeudi autour de résolutions visant à bloquer les 22 projets de vente d’armes à l’Arabie saoudite, aux Emirats arabes unis et à la Jordanie, actuellement en suspens, a indiqué M. Meendez sur son site web.

Les résolutions, qui n’ont besoin que d’une majorité simple pour être approuvées, pourraient recevoir le feu vert du Sénat, ouvrant la voie à une épreuve de force avec la Maison Blanche, selon le site internet politique The Hill.

L’organisation de ce vote démontre le mécontentement des législateurs envers la décision prise en mai par l’administration Trump de contourner le processus d’examen par le Congrès pour effectuer la vente de ces armes.

Le mois passé, le secrétaire d’Etat Mike Pompeo avait annoncé que l’administration Trump invoquerait la provision d’urgence d’une loi sur le contrôle des exportations d’armement, afin de mettre en œuvre les contrats de vente d’armes de 8,1 milliards de dollars signés avec les trois pays arabes, dans le but de contrer les « menaces » iraniennes.