Jérusalem sera désormais considérée comme la capitale d’Israël par les Etats-Unis, qui y transféreront leur ambassade. Cette décision a été prise en dépit des nombreuses mises en garde de diplomates craignant une flambée de violence au Moyen-Orient.
Donald Trump a officialisé ce mercredi 6 décembre depuis la Maison blanche la reconnaissance de Jérusalem comme capitale israélienne par les Etats-Unis – une décision annoncée depuis plusieurs jours. «J’ai déterminé qu’il était temps de reconnaître officiellement Jérusalem comme capitale d’Israël» a déclaré le président américain, ajoutant : «De nombreux présidents ont dit qu’ils voulaient faire quelque chose [dans ce sens] et ils ne l’ont pas fait.» Il a revendiqué une une «nouvelle approche» sur le conflit israélo-palestinien, tout en assurant qu’il ferait son possible pour qu’un accord de paix soit trouvé.
A rebours de plusieurs décennies de prudence de la diplomatie américaine sur ce sujet hautement délicat, Donald Trump estime qu’il s’agit d’une «reconnaissance d’une réalité historique».
Le locataire de la Maison Blanche a par ailleurs ordonné les préparatifs pour le transfert de l’ambassade des Etats-Unis de Tel-Aviv de Jérusalem. Il n’a cependant pas fixé de calendrier pour ce déménagement qui devrait prendre «des années». Il faudra en effet aux Etats-Unis trouver un site, financer et construire une nouvelle ambassade.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou s’est félicité d’un «événement historique».
Pour de nombreux dirigeants arabes, parmi lesquels ceux de l’Autorité palestinienne, il s’agit d’un véritable casus belli. En effet, Jérusalem-Est, annexée illégalement par Israël en 1967, est revendiquée par les Palestiniens comme capitale de l’Etat dont ils espèrent depuis de longues années une reconnaissance internationale. Le statut de Jérusalem est l’une des principales questions sur lesquelles se déchirent Israéliens et Palestiniens.
En outre, la quasi-totalité de la communauté internationale, qui n’a jamais reconnu Jérusalem comme capitale de l’Etat hébreu, ni l’annexion de sa partie orientale en 1967, s’est opposée au choix annoncé des Etats-Unis. En particulier, 57 pays musulmans de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) ont qualifié le 3 décembre le transfert de l’ambassade d’«attaque flagrante contre les nations arabes et musulmanes», et annoncé qu’ils tiendraient un sommet si la décision était actée.
Une promesse de campagne qui pourrait raviver de fortes tensions
Durant sa campagne, Donald Trump avait promis de faire déménager l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem, se conformant ainsi à une loi du Congrès adoptée en 1995 mais dont l’application est bloquée tous les six mois depuis 20 ans par les présidents américains qui se sont succédé.
Mais le moment auquel intervient cette annonce pourrait bien jeter de l’huile sur le feu. Alors que le Hamas et l’Autorité palestinienne, en conflit ouvert depuis plusieurs années, viennent de signer un accord historique ouvrant la voie à une réconciliation, l’annonce de la Maison Blanche pourrait bien fragiliser les minces espoirs de paix.
Réactions
La décision prise par Donald Trump de transférer l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem fait l’effet d’une bombe. Le mouvement islamiste palestinien Hamas a ainsi affirmé le 6 décembre que la décision du président américain Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël ouvrait «les portes de l’enfer pour les intérêts américains dans la région».
Ismaïl Radouane, un haut responsable du Hamas s’exprimant devant des journalistes dans la bande de Gaza, a appelé les pays arabes et musulmans à couper leurs «liens économiques et politiques» avec les ambassades des Etats-Unis et à expulser leur ambassadeur.
Le président de l’autorité Palestinienne Mahmoud Abbas a rappelé que Jérusalem était la «capitale éternelle» de la Palestine. «Par ces décisions déplorables, les Etats-Unis sapent délibérément tous les efforts de paix et proclament qu’ils abandonnent le rôle de sponsor du processus de paix qu’ils ont joué au cours des dernières décennies», a-t-il déploré.
Emmanuel Macron a pour sa part qualifié la décision de Donald Trump de regrettable. Plus tôt dans la journée, il avait rappelé «l’attachement de la France et de l’Europe à la solution de deux Etats». «Israël et la Palestine [doivent vivre] côte à côte en paix et en sécurité dans des frontières internationalement reconnues avec Jérusalem comme capitale des deux Etats», avait-il encore déclaré.
Le secrétaire général de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Saëb Erakat, a pour sa part déclaré que le président américain avait «détruit» la solution à deux Etats, ajoutant : «[Donald Trump] a disqualifié les Etats-Unis de tout rôle dans un quelconque processus de paix.»
Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu a fermement condamné le transfert de l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem. «Cette décision va à l’encontre du droit international et des résolutions des Nations unies», a-t-il dénoncé.
En Iran, le guide suprême de la Révolution Ali Khamenei a accusé les Etats-Unis de vouloir «déstabiliser» la région, tandis que le ministre iranien des Affaires étrangères a «fermement condamné» la décision américaine. L’Egypte a également fait part de sa désapprobation. D’après l’agence Reuters, le président égyptien Abdel Fattah al-Sisi doit s’entretenir au téléphone avec Mahmoud Abbas sur la question. Le roi d’Arabie saoudite s’est entretenu avec le président turc Erdogan, selon Reuters, mais n’a pas fourni plus de détails sur ces discussions.
Le Qatar évoque de son côté une «peine de mort pour la paix». Le bureau du président syrien Bachar el-Assad a fait savoir : «Le futur de Jérusalem n’est pas déterminé par un Etat ou un président, mais est déterminé par l’histoire ainsi que par la volonté et la détermination dans la cause palestinienne.»