Débarrassées du Tyran Omar Al-Bachir, les femmes soudanaises peuvent enfin danser et porter des pantalons

Le gouvernement de transition soudanais a abrogé , le 26 novembre dernier , une loi sur “l’ordre moral et public”, qui, selon une interprétation rigoriste de la loi islamique, rendait des actes jugés indécents pour les femmes passibles de châtiments. Une grande victoire pour les Soudanaises, sept mois après la chute du régime militaro-islamiste d’Omar Al-Bachir.

Il y a un an, alors qu’éclatait le mouvement de protestation contre le régime d’Omar Al-Bachir, les Soudanaises prenaient la tête des manifestations. Aujourd’hui, “ces femmes obtiennent leur première victoire”, titre Middle East Monitor.

“Tard dans la soirée de jeudi soir [28 novembre], la loi sur l’ordre public, qui était dirigée spécifiquement contre les femmes, a été abolie”, rapporte le site soudanais Sudan Tribune. Elle “octroyait aux tout-puissants services de police le pouvoir d’arrêter les gens pour une longue liste d’infractions”, explique le Washington Post.

Des peines allant de coups de fouets à la lapidation

“Ils pouvaient arrêter les femmes qui dansaient, celles qui portaient des pantalons, celles qui faisaient du commerce dans la rue, ou qui fréquentaient des hommes qui n’appartenaient pas à leur famille. Les peines allaient des coups de fouets aux amendes et pouvaient même, dans de rares cas, être la lapidation ou l’exécution”, poursuit le quotidien américain.

Cette loi avait été adoptée lors de l’arrivée au pouvoir du régime militaro-islamiste d’Omar Al-Bachir, l’ancien président soudanais, renversé en avril 2019.

“Une nouvelle ère au Soudan”

Dans un tweet, le Premier ministre, Abdallah Hamdok, a assuré qu’il ne s’agissait pas là d’une “revanche, mais bien de rendre leur dignité aux Soudanais après des années de tyrannie”, rapporte Sudan Tribune. “Il a également ajouté que cela marquait ‘l’avènement d’une nouvelle ère’ au Soudan.”

“Cette loi a été utilisée pour exploiter, humilier et violer des droits fondamentaux. Elle a servi à asservir financièrement et psychologiquement [les femmes]. De nombreuses Soudanaises ont subi des préjudices intolérables. […] Je leur rends hommage”, a écrit le Premier ministre soudanais.

Des manifestations spontanées pour saluer l’abrogation

Aussitôt après l’annonce de cette abrogation, des manifestants sont descendus dans les rues de plusieurs quartiers de Khartoum, la capitale, pour célébrer une décision attendue depuis longtemps, rapportent les médias du pays. Ils dansaient et chantaient des slogans révolutionnaires. D’autres lois sur la “moralité”, régissant notamment “la sexualité, la façon de s’habiller ou de se conduire dans le privé”, restent néanmoins en vigueur, rappelle le Washington Post.

En décembre 2018, des protestations contre des mesures d’austérité et l’augmentation du prix du pain avaient éclaté dans ce pays tenu d’une main de fer par Omar Al-Bachir et les militaires depuis 1989, et avaient conduit à la chute de l’autocrate. Une femme, Alaa Salah, tout de blanc vêtue, chantant au milieu d’une foule, était devenue l’icône de ce mouvement mené par les Soudanaises.

Des milliers de femmes ont été fouettées, condamnées à des amendes et même emprisonnées pendant le règne de Béchir en vertu de la loi sur l’ordre public pour « actes indécents et immoraux ».

Béchir a été destitué par l’armée le 11 avril après des mois de protestations contre son régime.

Les femmes étaient à l’avant-garde des manifestations ayant conduit à l’éviction du l’ex-président, puis contre les militaires lui ayant succédé.

Les militants affirment que la loi sur l’ordre public a été utilisée comme une arme, les forces de sécurité arrêtant régulièrement des femmes, même pour avoir assisté à des fêtes privées ou porté des pantalons.

Le nouveau gouvernement soudanais dirigé par le Premier ministre Abdallah Hamdok a promis qu’il défendrait les droits des femmes.