Juge et condamnée

sortezElle avait très mal dormi. Son barbu l’a chevauchée à deux reprises sans qu’elle ne ressente rien. Sinon quelques douleurs de bas ventre et le poids disgracieux de sa panse qui lui pesait lourdement en saccades rythmées sur son corps. Sans plaisir, sans goût comme si elle mangeait du navet cru, sans amour. Une corvée. Elle n’en était même pas consciente habituée à la soumissionn au mâle, éduquée à se haïr, haÏr son corps. Impur ! Pourquoi prendrait elle du plaisir, 7aaram? Jouir! quel sacrilège.Heureuse même que son mari soit incapable de le lui donner. Dieu là haut doit la considérer comme sainte. Elle en est si fière, lorsqu’elle se précipita pour la salaat du sobh à l’appel du muezzin qui déchirait le silence de la nuit et enveloppait les ronflements de son barbu. Comme pour fuir ce fantasme sur son jeune collègue imberbe qui la prenait après chaque acte sexuel avec son ventru, Chasser le désir , faire taire son corps qui criait famine, seule la salaat pouvait la sauver.
Le jour se levait radieux malgré un soleil pale et paresseux qui avait du mal à réchauffer l’atmosphère. Elle mit son voile, enveloppa ses cheveux crépus dans son foulard, se teinta le visage de barou9, et se rendit au bureau dans sa voiture de fonction un peu déglinguée. La foule des belligérants et des couples en instance de divorce s’entassait dans le couloir. Elle dût même engueuler et pousser du coude pour pouvoir siéger lorsqu’elle intercepta une dame qui ne ressemblait pas aux autres, Jeune , safira, bien fringuée, inondant le couloir de son eau de toilette d’Estée Lauder, néanmoins génée et effrayée de se retrouver au milieu de toute cette foule de femmes voilées pudiques, paumées dans ce couloir sordide qui suintait la crasse.
Appelez moi la jeune dame aux bottes , intima elle l’ordre au greffier. La femme en instance de divorce était toute heureuse d’être la première, se frayait difficilement son chemin sous les yeux des autres, différentes, uniformes , difformes sous leurs voiles et leurs démélés avec leurs maris qui les battaient ou mal les chevauchaient.
La juge scrutait son dossier. Non! Son différent avec son mâle n’était ni violences, ni mal bouffe, ni mal baise, Juste une volonté unilatérale de se séparer de son mari, un peu trop casanier à lui refuser les sorties au restaurant en amoureux, un peu trop ringard à facebooker en envoyant des messages de roses qui clignotent , un peu trop zinzin à penser du bien de Marzouki.
Puis elle leva les yeux vers cette safira. La fraîcheur de son eau de toilette lui faisait remonter au nez l’odeur des restes de la nuit avec son mâle et l’odeur fétide de son haleine . Sa chevelure noire flottant librement derrière son dos pour épouser le creux de ses hanches lui rappelaient sa mèche crépue rebelle à se terrer sous son foulard et qui prenait un malin plaisir à ressortir s’aérer de derrière son oreille.. Ses jambes galbées dans des bottes de cuir lui rappela ses talons à elle carrés qui serraient ses doigts de pieds et bombaient le reste.
Le sang de la jugesse n’a fait qu’un tour dans ses veines. la sueur suintait de sous son voile. des goutelettes dégringolaient comme sur un tobbogan le long de son échine creusée comme un vallon qu’enveloppe une chair immense.
La féminité la défiait, la dévoilait la dénudait. La femme en elle lui explosait au visage, l’éclaboussait de son insolence !
– « Allez vous faire foutre et revenez avec des habits plus corrects  » criait elle de tout son désespoir de juge prisonnière à la prévenue libre. .

K.S

Remarque : toutes ressemblance avec des personnages réels n’est que pure coïncidence