«Tu me baises bien mais plus de gifle ou d’étranglement c’est bien clair !»

Plusieurs centaines de SMS versés au dossier ont poussé Tariq Ramadan à reconnaître le 22 octobre des relations sexuelles «consenties» avec ses deux accusatrices. Les messages des plaignantes accréditent également cette thèse.

Après la révélation de centaines de SMS échangés entre  Tariq Ramadan et les deux femmes qui l’accusent de viol, le khouanji a dû reconnaître avoir eu avec chacune d’entre elles des relations sexuelles qu’il a qualifiées de «consenties». Des aveux difficilement arrachés, huit mois après sa mise en examen et son incarcération le 2 février.

Les messages envoyés à l’islamiste par les plaignantes à l’issue de leur relation sexuelle avec lui pourraient accréditer la thèse du consentement. Henda Ayari comme Paule-Emma Aline (surnommée «Christelle») ont toutes deux affirmé à la justice qu’elles avaient rencontré Tariq Ramadan une seule fois physiquement. C’est suite à cet unique rendez-vous qu’elles l’ont accusé de les avoir violées.

Or, les centaines de SMS révélés (399 pour Paule-Emma Aline, selon France info et 400 pour Henda Ayari selon le journal Le Monde) laissent entendre que les deux femmes ont continué à entretenir des échanges épistolaires avec le théologien, dont beaucoup sont d’ordre sexuel et particulièrement crus, et ont exprimé le désir de le revoir et de renouveler les expériences.

Les sextos très crus de Henda Ayari

Selon Le Monde, qui a pu les consulter, la grande majorité des 400 messages échangés entre Tariq Ramadan et Henda Ayari ont été rédigés par la jeune femme qui se décrit elle-même selon le quotidien comme une «amante frustrée». De très nombreux messages d’amour, de colère ou de haine en raison du silence de l’islamiste s’espacent parfois de quelques minutes seulement. Les SMS de Tariq Ramadan sont quant à eux «rares, très souvent laconiques, sexuels, et écrits dans un langage cru».

Les messages de Henda Ayari sont empreints d’ambiguïté. Elle traite Tariq Ramadan de «pervers et prédateur» dans un texto daté du 15 septembre 2012 et fait référence à sa violence dans quelques autres comme celui où elle écrit : «Tu me baises bien mais plus de gifle ou d’étranglement c’est bien clair !». Jamais en revanche elle n’utilise le terme de «viol».

Dans un autre message du 4 octobre 2012, elle écrit : «J’ai l’impression d’aimer et d’avoir envie malgré moi d’un vrai salaud ! Tu m’as surement jeté un sort !» Selon l’article du Monde, «l’accumulation des messages qu’elle a rédigés interroge sur la complexité de ses rapports avec le théologien»

«Ma pute et ma princesse soumise» 

Cinq mois environ après leur rencontre, Henda Ayari écrit, le 17 septembre 2012, à 12h14 : «Je suis jalouse de tes soumises, elles doivent bien s’éclater avec toi sauf quand tu les frappes c’est bien fait sûrement qu’elles le méritent ! J’aime bien ton côté fou et sage à l’extérieur ».

Selon Le Monde, dans de très nombreux messages qui font suite à leur rencontre, Henda Ayari invite Tariq Ramadan à la rejoindre, notamment pour «la faire jouir une fois encore». Elle s’inquiète en outre des sentiments de son amant à son égard et espère qu’il n’a pas oublié «ces bons moments qu’[ils] [ont] partagés, une seule fois certes mais si forts et intenses». Dans la minute suivante, elle écrit un nouveau message : «J’espère vraiment que tu as gardé un bon souvenir de moi comme moi de toi même si c’était court.»

Enfin, Tariq Ramadan lui répond en l’appelant «ma pute et ma princesse soumise» : «C’était bien mais si tu t’étais lâchée, ça aurait pu être mieux encore […] T’es une jalouse et tu veux tout me donner. Je sais que tu souffres depuis moi. Alors donne tout à ton maître et obéis à ton amour.»

Si ces écrits permettent de se faire une idée du type de liaison qu’entretenaient les deux amants, elle intéresse surtout la procédure pour qualifier le degré de consentement de la relation sexuelle qu’ils ont eue lors de leur seule et unique rencontre.

«L’emprise» exercée  sur plusieurs femmes

Les SMS de la deuxième plaignante, Paule-Emma Aline, dite «Christelle», n’ont pour l’instant pas pu être horodatés précisément. Toutefois, ceux qui font allusion à leur rencontre passée se réfèrent au jour où aurait eu lieu le viol présumé. La plaignante ayant elle-même déclaré n’avoir rencontré Tariq Ramadan qu’une seule fois, le 9 octobre 2009 à Lyon, après neuf mois de relation virtuelle.

«J’ai senti ta gêne… désolé pour ma « violence »», reconnaissait Tariq Ramadan le lendemain. «Tu n’as pas aimé… je suis désolé», ajoute-t-il. Paule Emma Aline écrit quant à elle : «Si je passais un mauvais moment je serais partie. Je suis restée et je t’ai donné plus qu’à quiconque et ta peau me manque. Tu m’as manqué dès que j’ai passé la porte. J’ai marché dans le parc à côté au petit matin, la tête pleine d’images en me demandant, physiquement et personnellement, si je t’avais plu.»

Suite à ce message, «Comment peut-on accorder le moindre crédit» à cette plaignante, se demande l’avocat de l’islamologue. «Ma cliente apportera aux juges une explication et une datation pour chaque message sans aucune difficulté, et avec autant de sérénité que dans tout ce qu’elle a dit depuis le début et qui s’est avéré exact», a réagi Eric Morain, l’avocat de Paule Emma Aline. Selon lui, ces échanges démontrent «l’emprise» exercée par Tariq Ramadan sur plusieurs femmes, et en particulier sur sa cliente, une convertie de fraîche date qui croyait se marier prochainement avec cette figure populaire de l’islam francophone.

Après le rejet de sa deuxième demande de remise en liberté le 8 août dernier, ces nouveaux éléments et la nouvelle ligne de défense de l’islamiste Ramadan, qui reconnaît désormais avoir eu des relations sexuelles avec ces femmes, vont peut-être marquer un tournant dans cette enquête très médiatique.