L’Allemagne prolonge de six mois le gel de ventes d’armes à l’Arabie saoudite

Berlin refuse que ses armes soient utilisés au Yémen, un conflit qui a fait plus de 10 000 morts depuis 2015

Le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert, a indiqué, jeudi 28 mars, que l’Allemagne ne procédera pas à de nouvelles transactions d’armes avec l’Arabie Saoudite jusqu’au 30 septembre 2019.

La question a suscité un vif débat au sein du parlement allemand. Les socio-démocrates ont soutenu la prolongation de ce gel alors que les chrétiens-démocrates ont appelé à son allègement en raison des risques qu’il fait peser sur l’industrie de l’armement allemande.

Concernant les programmes communautaires et les autorisations d’exportations correspondantes en rapport avec l’Arabie saoudite et les Emirats Arabes Unis, l’Allemagne « va s’employer dans ses consultations avec ses partenaires à ce que les équipements militaires produits en commun ne soient pas utilisés dans la guerre au Yémen », et ce pendant « neuf mois », jusqu’au 31 décembre.

La France et le Royaume-Uni réclamaient la levée du moratoire

La guerre au Yémen a fait plus de 10 000 morts depuis 2015. Le conflit oppose des forces progouvernementales, soutenues par l’Arabie saoudite, aux rebelles houthis. L’Allemagne fera aussi le nécessaire pour qu’aucun armement des projets qu’elle mène en collaboration avec d’autres pays ne puisse non plus être livré à l’Arabie saoudite ou aux Emirats jusqu’à la fin de l’année. Quant aux bateaux du chantier de Wolgast (nord-est de l’Allemagne) qui devaient être livrés aux Saoudiens, Seibert a assuré que le gouvernement trouverait une « solution », soit en vendant les navires sans les livrer dans l’immédiat, soit en les vouant à une utilisation par l’Allemagne.

Cela faisait plusieurs semaines que les partis au pouvoir en Allemagne étaient en désaccord sur le gel de ventes d’armes. Les conservateurs de la CDU d’Angela Merkel militaient pour une levée du moratoire quand les sociaux-démocrates du SPD martelaient qu’ils ne voulaient pas que le pays vende des armes dans des zones de crise ou à des dictatures. Cette question a aussi envenimé ces derniers mois les relations entre Berlin, Paris et Londres, Français et Britanniques faisant pression pour une levée du moratoire.

Des systèmes communs avec la France et le Royaume-Uni étaient en effet concernés par ce gel des ventes d’armement en raison de la présence de composants allemands. Dans une lettre fort peu diplomatique adressée à son homologue allemand Heiko Maas en février, le ministre des Affaires étrangères britannique, Jeremy Hunt, avait accusé Berlin de manque de loyauté. Mardi, l’ambassadrice de France en Allemagne, Anne-Marie Descôtes, avait critiqué le caractère « imprévisible » de la politique allemande d’exportations d’armes.

L’interdiction temporaire avait déjà été prolongée à deux reprises, la dernière jusqu’au 31 mars.

L’Arabie Saoudite est le deuxième marché international de l’armement allemand avec 417 millions d’euros au cours des neuf premiers mois de 2018. L’Algérie est le premier client avec 741,5 millions d’euros.

Avec agences