Covid-19 : Le Conseil de sécurité de l’ONU enfin réuni

Après des semaines de divisions, notamment sino-américaines, le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni pour la première fois jeudi 9 avril pour discuter de la Covid-19, une session qui devait s’apparenter « à une thérapie de groupe » selon certains diplomates.

Cette réunion par visioconférence et à huis clos a débuté à 15 h avec comme médecin-chef Antonio Guterres, secrétaire général de l’Organisation. Elle avait été demandée la semaine dernière par neuf des dix membres non permanents emmenés par l’Allemagne, excédés de la paralysie du Conseil face à une crise mondiale sans précédent.

Selon des diplomates, « les positions évoluent dans le bon sens » et Washington aurait accepté de ne plus insister à l’ONU sur « un virus d’origine chinoise », termes qui suscitaient la fureur de Pékin.

Lors de la session, le secrétaire général de l’ONU devait se focaliser sur les effets de la pandémie dans les pays et missions de paix à l’agenda du Conseil. Et tenter d’unifier cette instance qui s’est aussi divisée entre, d’un côté, les cinq membres permanents, et de l’autre les dix non-permanents.

« L’objectif, c’est de travailler, de rassembler le Conseil, d’aplanir les divergences et de réaffirmer la nécessité d’aller vers une décision aussi vite que possible » sur une résolution, a résumé un diplomate sous couvert d’anonymat avant la session.

Il n’était pas certain qu’un texte commun, qui serait le premier du Conseil depuis le début de la crise, soit publié après la réunion.

Deux projets de résolution concurrents sont discutés au Conseil de sécurité, mais aucun n’entre la totalité de ses 15 membres.

Le premier, initié par la Tunisie, est porté par les dix membres non permanents.

Dans sa dernière version, obtenue jeudi par l’AFP, il demande « une action internationale urgente, coordonnée et unie pour limiter l’impact de la Covid-19 ». Il prévoit aussi que « le Conseil de sécurité supervisera l’impact de la pandémie de la Covid-19 sur la paix et la sécurité internationale », avec des rapports réguliers du secrétaire général « quand cela sera nécessaire ». Le texte appelle enfin « à un cessez-le-feu mondial immédiat pour permettre une réponse humanitaire adéquate ».

« Deux approches »

Comme en défi au groupe des membres permanents, le projet ne leur a pas été transmis et n’est négocié depuis le 30 mars qu’entre les seuls membres non permanents: Allemagne, Belgique, République dominicaine, Indonésie, Estonie, Vietnam, Tunisie, Niger, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, et Afrique du Sud. Aucun vote n’a encore été programmé.

Le deuxième projet, centré sur un soutien à une « cessation des hostilités » réclamée en mars par le patron de l’ONU pour faciliter la lutte contre la pandémie et sur une « pause humanitaire », est proposé par la France.

Il n’est discuté jusqu’à présent qu’entre les cinq membres permanents (États-Unis, Russie, Chine, France et Royaume-Uni), ce qui est « très frustrant », confient sous anonymat plusieurs diplomates de pays membres non permanents, cités par l’AFP.

Avant une négociation à 15, il faut régler les différends entre les « Cinq Grands », rétorque-t-on à Paris, sinon cela ne fonctionnera pas. Pour cela, la France essaie depuis deux semaines d’organiser une visioconférence des dirigeants des cinq pays, compliquée par la récente hospitalisation du Britannique Boris Johnson et une réticence de la Chine à s’engager sur une date sans avoir clarifié le contenu de la session.

Alors que la voix du chef de l’ONU se fait régulièrement entendre, que l’Assemblée générale a adopté à l’unanimité de ses 193 membres il y a une semaine une résolution appelant à la « coopération », l’attitude du Conseil de sécurité depuis le début de la crise déroute.

« Missing in action » (perdu en pleine action), regrette un ambassadeur sous couvert d’anonymat, en évoquant l’absence jusqu’à présent de toute déclaration ou d’adoption de texte.

« C’est la première fois que je vois deux systèmes solaires au sein du Conseil de sécurité », renchérit un diplomate d’un pays qui n’en fait pas partie. « C’est très curieux cette double dynamique » entre permanents et non permanents ».

Pour Richard Gowan du centre de réflexion International Crisis Group, « il est important de reconnaître que le moteur principal de la coopération des dix membres non permanents est le mauvais comportement des cinq permanents ».

Au Conseil de sécurité, 9 voix au moins sur 15 sont nécessaires pour faire adopter un texte, sans véto de l’un des cinq membres permanents.

Avec agences