DROITS DE FEMMES : le débat de rats

abdennabi ben bayaLes débats réels ou virtuels sur les droits des femmes, récemment évoqués par le Président de la République, ont attisé des feux contradictoires. De la part des islamistes, rien n’est étonnant. Si quelques uns d’entre eux émettent des balbutiements de réticence camouflés par l’approbation de certains droits légitimes, si la majorité parmi eux reste ferme contre l’égalité avec l’homme en matière d’héritage, en suivant le gourou qui a boudé les cérémonies en prétextant des vacances chez Erdogan ou un autre, nous ne serons que plus convaincus de leur mauvaise foi. Le projet islamiste a été des plus éloquents quand ils ont pris le pouvoir : l’obscurantisation de notre culture éclairée. Pour eux, oui à l’excision, oui aux violences misogynes, oui au port de voile et de la burqa, mais jamais au grand jamais à l’égalité en héritage. J’ai même vu au palais de Carthage certaines voilées éviter d’applaudir à la proposition du président. Pour elles et eux, l’homme chômeur, l’homme bandit, l’homme pourri, l’homme voyou, l’homme inculte est au dessus de toutes les femmes laborieuses : la femme porteuse de leur fœtus, leur première nourricière et infirmière, la femme institutrice, la femme doctoresse, la femme pilote , la femme gendarme et soldate, etc.

Reste les autres, les « gens bien », comme les appelle un ami, les gens qui restent ambivalents. Ces messieurs et mesdames que j’appelle l’espèce des « oui-mais » nous auront toujours irrités plus que quiconque. Certain(e)s d’entre ceux-celles-ci, islamistes déguisés, tels des enfants dont la conscience est encore peu-développée, évoquent des justifications malaisées : ‘‘Oui la femme mérite d’être reconnue égale mais voyez-vous, on n’y peut rien : c’est notre ‘culture’ qui reste inchangée et qu’on respecte, c’est notre religion qui lui octroie sa position, qui dicte ce que nous devons faire et ce qui nous est interdit. »

Sachez, comme le dirait Mona Eltahawy, que celle ou celui qui dit ceci ‘‘n’a jamais rencontré Dieu, n’a pas de religion,’’ et surtout n’aura jamais le privilège ni la force d’être une femme. Sachez que la femme est la source de tous nos droits, nous les hommes : notre droit à la vie et à l’existence, notre droit aux soins et au bien-être. Sachez qu’une femme vaut à elle seule tous les millions d’hommes. Sachez que je rêve du jour où j’entendrai les femmes à l’avenue symbolique, Habib Bourguiba, hurler en choeur à tous les hommes ce secouant « Dégage! »

Pour finir, j’évoquerai ici l’humour mordant de mon ami algérien, Ahmad Brahimi :

Quand j’entends les [tunisiens] parler de classe et d’élégance, de droits humains et de liberté, j’ai toujours l’impression d’assister à des rats d’égouts qui tiennent une conférence sur les bienfaits de l’hygiène.’

Abdennebi Ben Beya