Une mosquée mixte et ouverte aux homosexuels ouvre ses portes à Berlin

moquée berlin La capitale allemande a inauguré, vendredi, une mosquée dite « libérale ». Dans ce nouvel espace religieux, les femmes sont autorisées à diriger la prière.

Un lieu de culte protestant berlinois va être converti en mosquée dans le centre de la capitale allemande. L’initiatrice du projet, une activiste féministe et musulmane, veut un lieu de culte mixte, sans niqab ni burqa.

Ibn Rushd-Goethe : c’est le nom donné à cette mosquée qui se veut ouverte à tous. La dénomination du sanctuaire musulman rappelle deux hommes de lettres. Ibn-Rushd, philosophe musulman andalou du 12ème siècle, connu en français sous le nom d’Averroès, et Johann Wolfgang von Goethe, le poète allemand. Deux hommes qui n’ont pas forcément un même regard sur le monde.

C’est la première mosquée présentée comme «libérale» à Berlin, mais aussi en Allemagne. Le lieu de culte musulman, inauguré le 16 juin, remplace le temple protestant de Saint-Jean, situé dans le quartier de Mitte, en plein centre de la capitale allemande, qui a accepté de louer le bâtiment. Mais c’est une mosquée un peu spéciale, où la ségrégation sexuelle, notamment, ne s’appliquera pas. «En principe, les portes de la mosquée sont ouvertes à tout le monde», explique l’initiatrice du projet, Seyran Ates dans le magazine allemand Spiegel. «Avec une exception notable : personne ne sera admis avec un niqab ou une burqa», ajoute cette avocate née en 1963 en Turquie, connue en Allemagne pour être à la fois militante féministe et musulmane. «Etre musulmane en même temps que féministe, ce n’est pas contradictoire pour moi», argumente Seyra Ates, qui prévoit également de former des imams femmes.

Dans cette mosquée, les deux communautés de l’islam, les chiites et les sunnites, sont invitées à prier ensemble, ainsi que les hommes et les femmes. Les membres de la communauté LGBT sont en outre les bienvenus. «C’était une erreur de la gauche [historique], à vrai dire, de penser qu’un monde sans religion serait meilleur. Ce n’est pas le cas. La question de Dieu concerne tous les êtres humains, même les athées», précise Seyran Ates.

Seyran Ates a déjà critiqué, dans son livre intitulé « l’Islam a besoin d’une révolution sexuelle », la séparation entre hommes et femmes dans les mosquées, ainsi que la diabolisation des homosexuels au sein des communautés musulmanes.
C’est pour cela que cette mosquée, unique en son genre, est disposée à accueillir les musulmans gays, lesbiennes et les transsexuels. « Nous avons besoin d’une lecture historique et critique du Coran », souhaite la féministe de 54 ans.

Cet événement survient alors que, selon le quotidien Die Zeit, le ministre adjoint des Finances allemand Jens Spahn veut introduire une «loi sur l’islam» afin de contrôler le financement des mosquées outre-Rhin. Alors que la question de la place de l’islam dans la société allemande fait débat, moins de trois mois avant les élections législatives de septembre, cette loi prévoit de faire passer des tests de langue aux imams officiant en Allemagne. Selon Jens Spahn, des prêches en allemand plutôt qu’en arabe favoriserait l’intégration des musulmans.

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Il faut noter, en outre, que l’engagement de Seyran Ates est loin d’être sans embûches. L’avocate a déjà fait l’objet de menaces. Au sein des musulmans d’Allemagne, on lui reproche sa tendance à formuler des injonctions à ses coreligionnaires femmes, par exemple sur la question du port du voile.
Malgré les menaces et les invectives à son égard, elle tient le coup. Mais la création de cette mosquée est, selon certains observateurs, le symbole de la force d’un désir de changement profond chez certains musulmans d’Allemagne.