Lettre ouverte à Mr le Président de l’Université Ez-Zitouna

Mahmoud Zouaoui

Cher collègue, j’ai toujours apprécié en vous votre ouverture d’esprit, votre modération et votre tolérance. Un jour j’ai eu l’occasion de vous voir batailler pour développer l’Institut Supérieur des sciences islamiques de Kairouan ; alors même que le ministère des affaires religieuses refusait la cotutelle. Les arguments que vous avez défendus à l’époque étaient de diffuser à l’échelle nationale et internationale les valeurs d’ouverture, de tolérance et d’indulgence de l’Islam à la tunisienne ; et de barrer la route à l’extrémisme et à l’intolérance qui nous viennent d’ailleurs. Je vous ai personnellement appuyé dans cette démarche et vous avez eu gain de cause.

Aujourd’hui, je suis étonné, surpris et déçu. Au nom de tous les professeurs de la prestigieuse université Ez-Zitouna, vous demandez l’annulation et le retrait pur et simple du rapport de la commission des Liberté et de l’Egalité dans sa totalité. En effet, je me demande comment des universitaires peuvent se permettre de rejeter un projet dans sa totalité sans l’avoir débattu publiquement, sans avoir valorisé les aspects positifs et proposer de rectifier et d’améliorer les aspects négatifs. Quelle leçon êtes-vous en train de donner à vos étudiants. N’est-ce-pas une leçon de fermeture, de rigidité et d’intolérance ? N’est-ce pas le contraire des valeurs que vous avez toujours déclaré défendre. Ce type de position ne risque-t-il pas de contribuer au développement de l’extrémisme et à la création d’une fracture sociale ?
En tant qu’universitaire, je vous invite aimablement à réviser votre position, à valoriser les points positifs du rapport qui ne contredisent pas les principes de l’Islam, et à appeler à un débat serein et constructif sur les autres points qui ne font pas l’unanimité.

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Appel à la Conférence des présidents d’universités

Le rapport de la commission des Libertés et de l’Egalité défend explicitement les libertés académiques, scientifiques, ainsi que la liberté des enseignants et des chercheurs dans l’exercice de leur métier (Articles 82 à 85). Le président de l’Université d’Ez-Zitouna a communiqué publiquement le rejet de l’intégralité du rapport au nom de son université et de ses enseignants. A ma connaissance, il est membre de la Conférence des présidents d’universités tunisiennes (CPU). Vu la gravité de cette position, qui tente fermer le débat intellectuel avant son commencement, et ses répercussions sur la communauté universitaire nationale et internationale, je lance un appel au président élu de la CPU pour communiquer publiquement la position de la Conférence des présidents d’universités à ce sujet.

Mahmoud Zouaoui