Algérie : Kader Japoni est le problème, le FIS est la solution

La bonne vieille méthode : opposer Islam et Raï, prière et concert de chant, un « religieux » et un chanteur. Ensuite recycler la mal vie d’une ville et d’une région et indiquer comme cause, non la corruption, l’Administration, la bureaucratie, les oligarques (là on ne dit rien, on baisse les yeux comme des toutous, on se fait petits face au régime, on mange dans sa main et on en profite dans l’informel), mais le « chant », le « Haram », la dépense pour « danser », un chanteur. On organise des prières dans la rue et les manifestants ne seront pas tabassés car ils ne sont pas médecins résidents mais des petits Allahs dont on a peur. On obtient l’annulation du concert avec les slogans de Abassi.
– Conclusions de cette grave dérive ? Le Raï est le mal, le chant est responsable de la mal vie à Ouragla, le vin est interdit mais pas la cocaïne pour financer un petit parti islamiste dont le chef est un ancien ministre, le néo-Fis c’est la vie et Kader Japoni est le responsable de l’état du pays devenu une salle d’attente où l’on prie et on médit. Le populo-islamisme est de retour, il excommunie ceux qui ne sont pas d’accord avec lui (à coup de d’insultes, de de fatwas et d’accusation de traîtrise et de collaborationnisme avec l’occident), El Mounkid, le journal du FIS est devenu des chaines TV, Ali Benhadj est devenu cents cheikhs cathodiques, les maquis sont devenus des mosquées salafistes et les plages des camps de démonstration de force des barbus et des « torses-nus » avec matraques et minarets. On occupe le bon peuple avec la haine du Maroc, le racisme hallal, le procès permanent de la France responsable même du goudron mal posé, on incrimine la Tunisie, l’Espagne, Israël, Trump et les danois.
– Conclusion ultime dans un pays sans homme fort : le Raï est le mal, le FIS est la solution. Les islamistes ont trouvé au Sud leur terrain : la misère, l’injustice, la contradiction violente entre la rente et l’exclusion, les chaines Wahhabites, la peur du Régime devenu fragile, le désert et le messianisme.
Un chanteur de Raï est donc le responsable des misères et des échecs de ce pays. Et annuler un concert de chant dans une ville sans joie, ni rires, ni danses, ni art, permet de faire du Djihad assis, d’aller au Paradis, de démontrer le courage des sournois, remonter au « maquis » et de détourner les regards. « Ghad El bassar » sur le Régime et gymnastique des « Foutouhates » pour monter sur le dos des miséreux et crier « Allah ouakbar » en attendant de prendre le pouvoir.

Kamel Daoud / 29 Juillet 2018.