Le cheikh dans le désarroi

trio d'idiots tunisieSalon doré de Monplaisir. Le Cheikh y trône affalé sur un fauteuil style faux louis 14 comme on en fabrique encore chez un menuisier du Cap bon. Une voilée de service s’active à désodoriser les lieux dans un frou frou de jupons qui balaient la moquette. Le cheikh marmonne quelques sourates. Inquiet, seul, se sentant abandonné. Sans perches solides qui craquent à force de pourriture, qui risquent de le faire chuter. Celle de l’islam en danger, personne n’y croit plus. Son costume cravate de modernité, non Plus. Sa tunisianité, une couleuvre qu’aucun citoyen n’arrive à avaler, son Nida , déserté par tout le monde qui se craquèle, se fissure et va même tomber sur la tête de son armada de députés voilées et barbus qui lui permettaient de tirer encore quelques ficelles dans ce pays. Par la faute de ces jeunes loups de Marzouk et de Brahim Yassine qui mobilisent pour mieux les coincer , les isoler et vouloir les achever là où il joue encore, dans son fief, chez lui , à l’assemblée.
Il cogite lorsqu’on annonce le fiston, flanqué des bsayyess et des tabbel puis de l’autre le slim Riahi, seul à s’introduire d’un pas lourd avec ses affaires en justice qu’il traine comme des boulets de canon. Une nouvelle coalition , leur dit il sans trop y croire. Le Fiston s’y jette, le Riahi marchande, le Bhiri, garde des « sots » rassure. Le mekki pompier porteur des seaux et des eaux jubile. Puis tout le monde signe . Une nouvelle coalition est née.
Le cheikh jette un regard sur le grand parc en face construit par les japonais. Deux minuscules silhouettes embrassent sur un banc public, un autre déglingué, non loin, ingurgite ses bières à l’ombre d’un fuchsia, les klaxons des voitures, pressés de rentrer, font rage et se mêlent à l’appel du prière de la mosquée à coté où quelques rares fidèles s’y pressent. Il croit même entrevoir Maaloul avec son gros ventre y entrer. Il ouvre la radio : sa coalition est montée en dérision. Les eaux inondent le sud et emportent avec eux le mô3tamed et le chef de police locale.
Le cheikh est isolé. Un essai ultime de s’accrocher. Il sait d’avance qu’il ne tiendra plus longtemps. La perche à laquelle il s’est accrochée dans un ultime sursaut de survie, ne résistera pas longtemps. Trop fragile pour maintenir à flots le gros ventre de son Bhiri, et le gros cul de ses nahdhawiettes à l’assemblée.
Le cheikh se meurt , son islam politique avec, emporté par l’oued Tunisie en furie. Il regrette même de s’y aventurer . Il n’a jamais su que ce long fleuve tranquille ne garde que ses pierres.

Essoussi Kamel